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Mark Lewis

Détournement du procédé cinématographique au profit de la perception plus que de la description : plan fixe — tranches de vie, architectures — tourné en une seule prise. Contradiction avec le principe actif du cinéma et mise en avant d’une urbanité désolée pointent le non-événement et le non-lieu.

— Éditeur(s) : Villa Arson, Nice / Museum of Modern Art, Oxford / Film and Video Umbrella, Londres
— Année : 2001
— Format : 28,50 x 21 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleur
— Page(s) : 72
— Langue(s) : français, anglais
— ISBN : 190427000X
— Prix : 20 €

Périphérique
par Steven Bode (extrait, p. 7)

Les films de Mark Lewis sont comparables à des incursions au sein de cette ville historique. Ces dernières années, cet artiste canadien vivant en Grande-Bretagne a produit une série d’œuvres provocantes et saisissantes qui explorent, pourrait-on dire, l’architecture conceptuelle du cinéma.
Utilisant l’ensemble des outils cinématographiques (il tourne généralement ses films avec des caméras de 35 mm, avec l’aide d’une équipe et d’acteurs professionnels), Lewis compose des fragments de films formant un tout imaginaire — chaque œuvre éclairant un élément structurel spécifique constituant l’un des piliers du cinéma (commercial).
Les films de Lewis, se succédant rapidement au cours des années 1996 à 1999, ont traité de sujets allant du titrage et de la bande-annonce (Two Impossible Films) aux scènes de transition (After : Made for TV et au générique (A Sense of The End), sans oublier de rendre hommage au rôle inestimable du figurant, dans une œuvre intitulée The Pitch.

Déroute
par Jean-Pierre Rehm (extrait, p. 53-55)

Cette manière de condenser les ressources cinématographiques pour les verser au profit d’un geste ou, comme on l’a dit, d’une parole interdite — ce qu’autrefois Lyotard qualifiait de tort — est caractéristique de l’ensemble du travail de Mark Lewis. Le développé silencieux du geste témoigne de la torsion de la contrainte et y répond ; il est à la fois son symptôme et sa bascule. C’est là l’horizon politique de ce travail, sans pourtant qu’aucune éloquence militante n’y trouve sa place.
À l’inverse, sa stratégie est héritière, comme cela est devenu flagrant aujourd’hui pour la part la plus intéressante de la production actuelle (Stan Douglas, Pierre Huyghe, Philippe Parenno, Jean-Luc Moulène, etc.), du mélange de deux traditions a priori antagonistes. Celle du pop, d’un côté : son effet caméléon, retourner l’ennemi avec ses propres armes, mais surtout constater qu’il n’y a plus de dehors aux différents usages idéologiques des images. Et celle, d’un autre côté, de l’âpreté conceptuelle : les visées critiques sont à l’origine et aux fins des travaux, la jouissance spéculative reste à l’ordre du jour, etc.
Si l’histoire de l’art, incarnée par celle de la peinture au premier chef, a servi à nombre d’artistes à maintenir le cap des exigences de l’art conceptuel avec d’autres moyens, et si elle a suffi à inscrire celles-ci sous le sceau d’une tradition ininterrompue, la posture de Lewis est autre. Moins obnubilée par la gestion d’un fond, moins asservie à la résolution dialectique de l’héritage moderne, sa position se soumet à des impératifs plus aléatoires.

(Publié avec l’aimable autorisation de la Villa Arson, Centre national d’Art contemporain de Nice)

Steven Bode est directeur de Film and Video Umbrella à Londres. Comme conservateur, il a monté plusieurs grandes expositions de films et vidéos d’artistes. Comme critique, il a beaucoup écrit sur le sujet.
Jean-Pierre Rehm, critique d’art et de cinéma, coIlabore à diverses revues et a participé à de nombreux ouvrages sur des artistes ou des cinéastes. Il est aujourd’hui directeur artistique du festival international du Documentaire de Marseille, et également en charge du post-diplôme Art de l’école nationale des Beaux-Arts de Lyon.
David Turnbull est un des directeurs de ATOPIA (architecture/information/urbanisme). Il fait de la recherche sur les effets des nouvelles technologies sur les bâtiments et les villes. Dernièrement il a été professeur aux universités de Yale et Toronto. Il est actuellement professeur d’architecture à l’université de Bath (Grande Bretagne).

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