La genèse du travail de François Rouan se situe dans le choix d’une technique spécifique, tout à fait singulière pour un peintre. Nattant plusieurs bandes de toile trempées dans la peinture, il développe à partir de 1971 un travail de tressage, jouant sur des effets de surface dont il fait émerger et se dérober alternativement des parcelles dans les intrications du tressage, provoquant ainsi une vibration intense de la surface.
Plus qu’un jeu formel, ce parti pris technique porte la trace des hésitations du peintre qui, débutant dans les années 70, doutait comme nombre de ses contemporains du devenir de la peinture tout en cherchant à lui frayer de nouveaux possibles.
Cette recherche prit, pour nombre d’entre eux, le chemin d’une redécouverte patiente et quasi thérapeutique des composantes matérielles de la peinture, après les vagues successives d’avant-gardes. Ce programme donna lieu à des propositions extrêmement variées, regroupées sous le terme de «Support Surface». Ces investigations toujours singulières ont pour vecteur commun l’expérience d’un doute constitutif.
Un séjour à la villa Médicis conduira par la suite le peintre à agiter plus encore cette surface mouvante et incertaine, rythmée par ce «ou bien ou bien» promenant le regard entre recto et verso, surface et profondeur. Des éléments figuratifs sont introduits à l’intérieur des trames abstraites, faisant évoluer son travail vers un espace de plus en plus hétérogène et contradictoire. Fragments de corps féminins, motifs végétaux et éléments d’architecture se développent désormais à l’intérieur de ces réseaux de lignes.
Les tableaux actuels vont plus loin encore dans cette disruption de la surface. Rouan pousse à l’excès cette turbulence de la matière, jouant sur ses effets de transparence et d’opacité, en une circulation fluide entre surface et profondeur.
L’espace pictural s’apparente à une terra incognita que le peintre explore. Ces mouvements successifs de recouvrement où la figure se dissout tout en continuant à vibrer dans les entrelacs de la matière évoquent également le travail de la mémoire, détournant le peintre de considérations purement abstraites liées à l’espace.
Ces travaux portent avant tout la marque du temps. Celui d’abord passé à réaliser ces peintures, de grand format pour la plupart, et dont on devine dans le foisonnement de la matière toujours très dense les devenirs successifs. Rouan jette le spectateur dans les méandres d’une géographie affective que l’exercice du doute continue aujourd’hui encore à travailler.
François Rouan
— Mappe, ombre cuivre sur fond rose moucheté, Laversine, 2003-2005. Peinture à la cire sur toile. 172 x 140 cm.
— Mappe, grès rude et sombre sur rose perlé, Laversine, 2003-2005. Peinture à la cire sur toile. 178 x 132 cm.
— Mappe aux oiseaux, Laversine, 2003-2005. Peinture à la cire sur toile. 157 x 205 cm.
— Engiadina, bleu dur, Laversine, 2001-2003. Peinture à la cire sur toile. 162 x 211 cm.
— Mappe, rose translucide aspergé d’éclaboussements verdâtres, Laversine, 2003-2005. Peinture à la cire sur toile. 196 x 152 cm.
— Engiadina vineuse, Laversine, 2001. Peinture à la cire sur toile. 162 x 211 cm.
— Mappe, verdâtre tacheté d’ondulations marines, Laversine, 2003-2005. Peinture à la cire sur toile. 200 x 155 cm.
— Engiadina jaune stil de grain, Laversine, 2001-2003. Peinture à la cire sur toile. 162 x 211 cm.
— Mappe, ambre brûlée sur gris bleu violacé, Laversine, 2003-2005. Peinture à la cire sur toile. 202 x 143 cm.
— Mappe, blonde jaspée de brume mate, Laversine, 2003-2005. Peinture à la cire sur toile. 185 x 135 cm.
— Figure – Paysage I, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage II, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage III, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage IV, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage V, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage VI, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage VII, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage VIII, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage IX, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.
— Figure – Paysage X, 2005. Tirage charbon sur papier. 28 x 56 cm.