Présentation
Sébastien Gokalp, Choghakate Kazarian
Lucio Fontana. Rétrospective
Lucio Fontana est, avec Giorgio de Chirico, l’un des artistes italiens qui a le plus marqué le XXe siècle. Sculpteur de formation, il a parcouru avec une totale liberté tous les domaines de la création en volume: tour à tour figuratif et abstrait, pratiquant le modelage, la céramique polychrome. Il a aussi réalisé les premières installations en néon et des environnements.
Inventeur du mouvement spatialiste qui revendiquait le dépassement des techniques et des genres traditionnels de l’art, il est la référence des artistes italiens à partir des années 1950 et un modèle pour les mouvements d’avant-garde des années 1960 avec ses toiles fendues.
Cette exposition rétrospective, réalisée en collaboration avec la fondation Fontana, réunit près de 150 œuvres. Organisée autour des chefs-d’œuvre de l’artiste italo-argentin, pour la plupart rarement vus en France, ce catalogue de la rétrospective du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris présente également des sections plus inattendues, comme la sculpture en céramique et les collaborations de l’artistes avec les architectes.
Avec des textes de: Jean-Louis Schefer, Daniel Soutif, Luca Massimo Barbero, Paolo Campiglio et Marina Pugliese.
Ce catalogue est publié à l’occasion de l’exposition «Lucio Fontana, rétrospective» présentée au musée d’Art moderne de la Ville de Paris du 25 avril au 24 août 2014.
«Perforation, surfaces criblées, surface entaillées et dont les «blessures» donnent réalité à cette peau tendue comme une couleur. Ces répétitions modulées emportent un rythme d’inscription proprement énigmatique d’inauguration ou de rupture; aussi énigmatiques que les mains de Gargas qui ne signifient autre chose que leur rythme, leur répétition rituelle: les unes et les autres dessinent leur syntaxe spatiale, elles n’amorcent d’autres formes de récit que leur mélodie rituelle et, je crois, l’expression de leur essence sacrificielle.[…]
Que vient-il à la fois ouvrir, meurtrir, c’est-à -dire maintenir béant? Cette plaie mélodique par laquelle le monde imaginaire de l’art devient réellement la surface coenesthésique de son imagination et de sa réalité. Comme si, par ce geste souverain, il était écrit: le monde dont l’image est résolue en objets qui ne sont plus mon espace, atteint dans la dernière limite de son illusion, sa peau était ma peau et sa blessure ma blessure, la jouissance dont la variation mélodique est ouverte à l’infini de cette abolition, à la caresse sublime d’une dernière tension de couleur, douce, aux teintes pastel; comme si, enfin, cette lacération vive faisait l’accomplissement harmonieux, élégant, d’un sacrifice et que cette bouche d’ombre ouverte sur la peau qui est la dernière surface de contact du moi maintenait dans sa blessure l’ultime illusion par laquelle notre pensée, toujours, est l’irréalité du monde.
Il n’a pas manqué d’interprétations de cette magistrale abolition de la figure atteinte dans sa chair; toutes sont justes: plaie ouverte par la lance sur le corps du Christ (blessure inaugurale de nos rituels religieux et leur idéologie), sexe ouvert dans une peau immaculée. Eve naît d’une blessure du premier homme qui devient sa matrice: elle est l’héritage d’une blessure.»
Jean-Louis Schefer
Sommaire
— Préface de Fabrice Hergott
— Préface de Nini Ardemagni Laurini
— Fontana, l’impossible maintenant, par Jean Louis Schefer
— I.1899-1946 Le sculpteur
— II.1946-1958 Le spatialiste
— III.1958-1968 Le maître des hautes fêtes
— Annexes
— Anthologie de textes
— Œuvres exposées
— Bibliographie sélective
— Remerciements