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Löyly

Dorothée Smith photographie tout le temps, tous les jours. Ce besoin compulsif de photographier sa vie n’est pas sans rappeler Nan Goldin, Larry Clark ou Antoine d’Agata, figures tutélaires de son œuvre. A travers sa série Löyly, l’artiste explore la question du genre et de ses possibles déclinaisons, mutations.

Information

Dorothée Smith, Dominique Baqué
Löyly

Dorothée Smith invente son propre mode d’exister et son propre univers, crée une écriture photographique singulière, tandis qu’elle joue de ses avatars sur la toile, construit un véritable réseau protéiforme et amical où se retrouvent les corps qui hésitent entre le masculin et le féminin, les identités suspendues, en devenir. La question originaire est celle du passage, du transit, de la transition. De l’entre-deux, cet espace inassignable et indéterminé qui ouvre à tous les possibles.

C’est dans le froid, les brumes glacées, l’obscurité et les vapeurs d’eau, les pluies et les neiges que l’artiste se sent à sa place et que son propre corps — biologique, culturel, artistique — prend position. La colorimétrie — bleu froid, bleu grisé, blanc évanescent, au bord de l’ultime disparition — est bien celle des contrées du nord. Les corps sont comme en réserve, en repli, en retrait, souvent allongés, carnations d’albâtre et regards évanouis.

Dans la série Löyly, on voit un sombre rocher dessinant son arête sur un ciel qui ne se distingue pas de la pierre, et qui évoque incontestablement la peinture romantique, une double nuée menaçante comme une tornade, des paysages de gel et de froidure. Mais aussi beaucoup de jeunes gens photographiés de dos, le corps souvent tatoué, des postures de rêverie ou de repli. D’être-ailleurs. Un jeune homme très pâle, yeux glacier et cheveux noir corbeau, comme une apparition récurrente dans les séries, et un sublime visage d’androgyne, regard rêveur et mélancolique, perdu dans sa propre intériorité inviolée, regard mi-clos, bouche sensuelle entr’ouverte pour une parole ou un baiser qui n’adviendront pas. Fatigué, délicieusement morbide, il repose avec délicatesse sa tête de jeune éphèbe sur un coussin de velours, bras replié sous lui, offert et déjà retiré, disparu, telle une fugace et désirable apparition.
Texte de Dominique Baqué

Sommaire
— Löyly, série photographique de Dorothée Smith
— C19 H28 02 (Agnès) 2011, Vues de l’installation vidéo de Dorothée Smith
— Cellulairement 2012, Etude
— Hospitalités mouvantes, texte de Dominique Baqué
— Version anglaise
— Biographie
— Remerciements
— Colophon

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