Sur les murs blancs de l’espace expérimental du Plateau et sur deux panneaux centraux, des cadres de petits formats sont régulièrement alignés. L’homogénéité de la salle frappe et annonce une même constance dans le procédé utilisé. Les trente-sept collages exposés sont tous conçus sur le même modèle : des articles et images de la presse de propagande communiste, édités dans les années 60 à l’occasion de l’Exposition universelle de Zagreb, ont été découpés avec minutie à la pointe du cutter.
Mais contrairement à d’autres artistes ayant vécu à l’ombre du Rideau de fer, David Maljkovic ne cherche pas à détourner ces stéréotypes vieillis de la propagande politique et économique. Ni ironie ni dérision dans son découpage obsessionnel. De manière réfléchie, froidement, par des carrés, des rectangles ou des cercles tracés au compas, son œuvre compose un message censé être assimilé sans nuances, dans sa globalité. Ici un président sans tête, qui, réduit à une paire de jambes, perd tout pouvoir de fascination. Plus loin des chiffres escamotés et des produits miracles évaporés sous les ciseaux de l’artiste. David Maljkovic prive les clichés glorieux de ce qui leur donnait du sens.
Mettre en perspective les images d’hier et le regard d’aujourd’hui, telle est la démarche de l’artiste. Son travail prend tout son sens appliqué à l’ex-Yougoslavie, un pays au passé récent riche et complexe. Par ces collages, il propose un «last review», un dernier examen mais aussi une dernière critique, de ces scènes du passé avec un œil contemporain. Libre au public de se réapproprier les espaces manquants, de combler les trous en regardant sous un jour nouveau ces instantanés d’une autre époque.
David Maljkovic
Lost review, 2008. Série de collages et d’ installations. Dimensions variables.