Martine Bedin
L’Objet déluré
Depuis toujours, Martine Bedin dessine ses idées. Elle reporte dans des carnets noirs, avec minutie et soin, les formes qu’ont pu prendre ses réflexions sur les objets et la vie qu’ils induisent. Page à page, se feuillette ainsi le bouillonnement continuel et joyeux qui marque le parcours créatif de cette jeune étudiante arrivant par hasard dans l’Italie de la fin des années 1970. De la politique à la vie familiale, de l’art à l’industrie, de l’Antiquité au Futur, la péninsule est alors saisie de soubresauts créatifs et révolutionnaires. Le monde semble à portée de main, tous les espaces ouverts. Par rencontres et affinités, Martine Bedin en vient à partager sa vie avec le foisonnant groupe de personnalités réunies autour d’Ettore Sottsass. Elle participe dès lors aux manifestations de ceux qui choisiront de s’appeler — inspirés par une chanson de Bob Dylan — Memphis pour le salon du meuble de Milan en septembre 1981.
Si tous les objets de Martine Bedin ont été d’abord dessinés dans ses carnets, nombres de ces dessins n’ont jamais pris forme. Fidèle à l’optimisme drôle et volontiers bravache de ses débuts, Martine Bedin s’est mis en tête qu’elle était maître de son destin et pouvait remettre en jeu certains de ses projets anciens. Si le groupe Memphis produisait et produit encore des objets dans des séries non numérotées de manière à se jouer des fétiches de la société de consommation, le décalage chronologique détourne quant à lui les blafards codes du vintage. Le dessin conserve son temps propre que n’interrompt que temporairement la réalisation des objets.
Ses objets ont été produits grâce à un mécène suisse qui a accueilli cette exposition de façon inédite au sein de la fondation Speerstra à Apples, au bord du lac Léman en Suisse. Le musée des Arts décoratifs et du design est très heureux d’accueillir à son tour cette exposition et d’autant plus que Martine Bedin est bordelaise d’origine. Elle a notamment participé au groupe Memphis aux côtés d’Andréa Branzi à qui le Musée des Arts décoratifs et du design consacre sa première rétrospective.