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Livraison no.12 Third Text, une relecture

Livraison no.12, prend pour sujet et matériau une autre revue, Third Text dirigée par Rasheed Araeen. Ce numéro ne sera pas un simple miroir de Third Text. Envisagé à l’origine comme une anthologie de textes, le projet est devenu autre chose : un écho de Third Text, mais depuis une situation différente. C’est aussi une relecture, à la fois rétrospective et prospective.

Information

Rasheed Araeen, Jimmie Durham, Geeta Kapur, Gerardo Mosquera, Yang Zhenzhong, Shilpa Gupta, Olu Oguibe, Ihab Hassan,
Livraison no.12 Third Text, une relecture

Pourquoi Third Text? Sans vouloir répéter ni anticiper ce qui sera dit dans la revue, nous sentons que cette question demande dans un premier temps qu’on y apporte quelques clarifications. Notre objectif est d’élucider quelques points sans toutefois reproduire cette habituelle fermeture d’esprit qui tend à donner des explications trop nettes et des définitions toutes faites.

L’étude de questions qui sont socialement, politiquement, culturellement et philosophiquement entrecroisées, nous met devant une complexité qui ne peut être ignorée. Et ce n’est qu’à travers ses manifestations dans des pratiques culturelles bien précises que cette complexité peut être abordée.

Une revue comme Third Text ne fonctionne pas. et ne peut fonctionner selon la logique qu’une solution – fins et objectifs – est appliquée à un problème. Nous nous refusons à dresser une frontière autour de quelque chose qui est déjà perçu comme marginal et contenu en dehors des discours artistiques et culturels dominants. Et, en ce qui concerne les slogans, accusations et autres dénonciations, nous les laisserons à ceux qui se sont déjà illustrés dans ce domaine : les fonctionnaires et les administrateurs.

De l’essentialisme culturel au marxisme vulgaire, de La rhétorique du Black power au biologisme du féminisme radical, de l’élitisme du dialogue Nord-Sud au paternalisme du groupe Intermediate Technology, du dévouement des travailleurs sociaux communautaires au populisme des intégristes, nous n’avons rien à ajouter à ta liste des nombreuses propositions et solutions déjà fournies.

Mais qu’entendons-nous par le mot Third, sinon ce à quoi il réfère manifestement: le Tiers-monde ? Si Third signifie tiers-monde, quelle est ta nature de cette représentation ? Est-elle déjà circonscrite ? Si elle l’est, par qui ? Est-il possible de Ia concevoir comme une chose autour de laquelle on ne peut désormais plus tracer une ligne définie ? Si nous comprenons le Tiers monde comme une région géographique, ce qui est implicite dans les slogans du dialogue Nord-Sud, la disparité économique entre les pays riches occidentaux et la pauvreté de la plupart des pays du tiers-monde est-elle suffisante pour les définir
séparément et différemment ?

Comment alors penser la prospérité des pays producteurs de pétrole, ou le pouvoir économique du Japon, au sein d’un concept du tiers-monde entendu comme une entité sous-développée ? L’Arabie Saoudite et le Bengladesh, par exemple, représentent deux pôles opposés, tout en partageant la même expérience de colonisation et de La domination néo-coloniale.

Néanmoins, trente-cinq ans après l’invention du terme Tiers-monde, il est généralement convenu qu’il se réfère à certaines régions géographiques, ainsi qu’à certains peuples et cultures. Il faut toutefois souligner que bien que ces populations et cultures partagent la même histoire du colonialisme et qu’elles sont maintenant sous la domination néocoloniale,
elles ne se rangent pas dans une seule catégorie unifiée, ou de former une entité monolithique. Cela résulte non seulement de contradictions économiques, mais aussi de différences culturelles.

Il est donc impératif d’abandonner tout modèle d’opposition binaire qui impose un système de classification fixe. et selon lequel les pratiques culturelles sont classifiées en termes de Même et Autre. C’est pour cette raison que des considérations sur l’art ne peuvent se séparer des questions politiques.