L’exposition « The Great Escape » à l’Ardenome, à Avignon, rassemble des photographies, vidéos, impressions sur papier et sculptures 3D de Lionel Vivier qui poursuit son exploration de la place de l’image dans la société actuelle et son analyse de la modification du réel par les technologies numériques. Cette présentation volontairement pluridisciplinaire se nourrit des dialogues inédits entre les matières et les formes pour offrir une vision mélancolique.
« The Great Escape » : œuvres de Lionel Vivier à l’Ardenome
Les œuvres de Lionel Vivier, qui cumule les rôles d’artiste, de directeur artistique et de paysagiste, sont le fruit d’un processus de création singulier. Conscient de l’impact des technologies numériques sur la réalité, devenue une notion incertaine à cause de la prolifération des images qui entraîne leur dilution et leur déterritorialisation, Lionel Vivier a pourtant choisi d’utiliser ces technologies mêmes pour explorer les tensions engendrées par l’envahissement technologique.
Associé au duo d’artistes Gourau & Phong qui s’expriment par la photographie et l’image numérique, Lionel Vivier a réalisé des images à partir d’un dispositif technique composé de multiples appareils photographiques qui lui a permis de réaliser des prises de vue d’un même sujet, un jeune homme, sous différents angles différents. L’agrégation de dizaines de clichés ainsi produits constitue un portrait d’un genre nouveau et la matière première des tirages photographiques, de la vidéo et des sculptures présentés dans l’exposition « The Great Escape ».
Lionel Vivier met en lumière l’effritement du réel
Le parcours de l’exposition rend compte de cette méthode particulière de création en reliant les médiums, les techniques et les formes les unes aux autres : la photographie à la sculpture, la surface au volume, etc. Dans la première salle, une série photographique et une vidéo mettent en évidence la dématérialisation des corps à travers les vues à 360 degrés du modèle passées à travers la machine 3D dont elles ressortent fragmentées. Détournant la finalité et les codes traditionnels de la photographie et de la vidéo, Lionel Vivier livre à travers elle une vision parcellaire et ambigüe du réel et un univers visuel très pictural mais chaotique où la matière est comme atomisée, les êtres voués à la désagrégation.
Dans la seconde salle, les formes précédemment dissolues retrouvent leur matérialité à travers des sculptures réalisées par impression 3D à partir d’un fichier numérique des portraits photographiques créés auparavant, en résine ou en céramique. Ces pièces créées par ordinateur côtoient deux blocs de pierres prélevés dans une carrière de la région dont les irrégularités naturelles sont recouvertes d’une fine pellicule photographique colorée. Ainsi, tout en s’inscrivant dans un processus de reproduction dépendant de la machine, Lionel Vivier met l’accent sur le geste manuel et une technique artisanale qui renvoie finalement la production mécanique de ses sculptures à une opération humaine.