Le papier peint de Kinwah Tsang occupe une place de choix à La Sucrière, le principal lieu de la Xe Biennale de Lyon. Rien moins que le hall d’entrée. L’art déco donne le «la» de l’exposition. On est d’emblée dans le monumental et dans l’ornemental. Dans le figuratif floral, donc à la limite de l’iconoclastie, pour ne pas dire de l’insignifiant ou du non-dit.
Uniformément bleus sur fond blanc, par conséquent pas du tout chinés, les feuillages de Kinwah Tsang s’étalent du sol au plafond en bouchant les coins et recoins de la pièce, en escamotant tout repère visuel, en camouflant le lieu de passage en salle d’exposition à part entière, au risque de provoquer quelque embouteillage.
Il existe, comme on sait, une grande variété de bleus, une symbolique pondéreuse qui connote cette teinture, une mythologie quasiment romantique qui, des vitraux chartrains aboutit à Yves Klein, en passant par Matisse et Picasso. Dans les arts appliqués, on parle plutôt en termes géographiques, terrestres et terreux, de bleu de Nîmes, de Chine, de Gênes. Kinwah Tsang a opté pour la demi-teinte qui orne depuis près de deux millénaires la porcelaine de Chine: un azur voilé de violet.
Comme quoi, on peut, de nos jours, à Canton comme à Hongkong, être à la fois pop et op’. Pop dans la légèreté thématique ou l’absence de problématique, op’ dans les effets de perception, les troubles hallucinatoires, le vertige du trompe l’œil que ne manquera pas de subir le visiteur de la Sucrière.
Avant même d’atteindre le comptoir du vestiaire ou la librairie, le spectateur se trouve bel et bien au cœur du sujet: le spectacle du quotidien. Ou, si l’on veut, dans la démesure de l’éphémère.