Isamu Noguchi, Yanagi Sori
L’esprit Mingei au Japon : de l’artisanat populaire au design
Dans cette exposition, à partir d’un cas précis — celui du penseur Yanagi Soetsu, promoteur du mouvement « Mingei », et son fils Yanagi Sori, premier designer d’après-guerre —, il s’agit de réfléchir au rapport que le XXe siècle a établi entre la redécouverte de certains arts traditionnels et l’évolution de l’art moderne international à travers le design.
Cette dynamique sort la perception des arts populaires traditionnels d’un point de vue strictement ethnographique ou anthropologique, pour l’inscrire dans une situation historique précise : celle du Japon de la première moitié du XXème siècle (jusqu’à la fin des années cinquante). Il s’agit aussi d’une perspective esthétique, morale et formelle, qui trouve aujourd’hui ses échos dans les « formes originelles » de certains designers contemporains.
Le mot « Mingei » est une abréviation de minshuteki kogeï, qui signifie « l’artisanat ou l’art populaire fait par le peuple et pour le peuple ».
Penseur et homme d’action, Yanagi Soetsu milita toute sa vie pour la promotion des arts populaires. Il le fit par ses écrits, notamment avec la publication mensuelle Kogeï (qui signifie « artisanat »), par son enseignement, par des expositions… Selon l’esprit et les techniques traditionnelles Mingei, il construisit ainsi, en 1936, le Nihon Mingeikan à Tokyo.
Il faut dissiper d’emblée les questions qui pourraient se poser concernant la coïncidence chronologique du mouvement Mingei avec la montée du nationalisme et de l’impérialisme japonais pendant l’entre-deux-guerres : dès 1919, Yanagi Soetsu écrivit son désaccord avec la politique d’agression militaire du Japon. En 1924, il dédia d’ailleurs la création du Musée de l’artisanat des peuples coréens, à Séoul (le premier du genre en Asie), à « la beauté de l’art coréen », et en fit un témoignage de « son profond respect et de son affection à l’égard de la Corée ».