Les Rencontres internationales de la photographie d’Arles 2007
L’édition 2007 des Rencontres d’Arles bénéficie de l’expertise de nombreuses personnalités internationales de la photographie.
Découvertes
La révélation de talents passe désormais par les prix depuis leur création avec la Fondation Luma en 2002. La qualité des nominateurs 2007 est exceptionnelle, tous les cinq dirigent des entités internationalement respectées. Ils offrent à Arles leurs sensibilités différentes à travers quinze expositions pour un coup de pouce à des artistes prometteurs. Ils désigneront deux, et non plus un, meilleurs livres de l’année : la meilleure monographie retraçant une carrière ou meilleur livre thématique, et le meilleur livre lié à un projet photographique d’auteur.
Dashanzi Art District
La Chine, souvent invitée à Arles – 1986, 1988, 1989, 2001, 2003 – connaît un phénomène que nous nous devions de présenter : le district de Dashanzi. Cette superbe cité militaro-industrielle en plein cÅ“ur de Pékin, investie par quelques artistes en 2002, est devenue en 5 ans un lieu unique au monde de regroupement d’artistes, de galeries, de théâtres…
Le Dashanzi International Art Festival (DIAF) propose pour Arles une sélection de ces artistes afin de comprendre le foisonnement exceptionnel qu’abrite cette cité-laboratoire. Photographes, plasticiens, performers, tous les modes artistiques se mélangent pour traduire la transformation de la Chine. Accueillir Dashanzi à Arles, c’est aussi le moyen de soutenir de l’extérieur ce mouvement passionnant, aujourd’hui menacé d’expulsion par la transformation du site en centre commercial de luxe.
India
La croissance de l’Inde est rapide et une génération de photographes indiens ressent le besoin de traduire cette société vaste et très codée. Même besoin que les photographes Chinois, mais là s’arrête le parallèle. La société indienne n’a pas subi le choc de la révolution culturelle. Au contraire, la démocratie et l’indépendance, dont on fête le 60ème anniversaire, ont fait perdurer le carcan social. Cette permanence pèse sur la jeune génération indienne. Les photographes présentés à Arles semblent dire ce déchirement entre attachement aux traditions et besoin d’émancipation, en traitant de la famille, de l’amour, de la sexualité.
Enfin, nous présentons la rétrospective de l’exceptionnel chroniqueur de l’Inde depuis quarante ans : Raghu Rai.
Privés
La sphère privée se défait peu à peu de trésors photographiques que l’on retrouve dans les marchés aux puces, les boites à chaussures des familles ou dans les ventes aux enchères. Plusieurs ensembles exceptionnels sont ainsi présentés aux Rencontres 2007.
La photographie en Inde est une vieille passion qui remonte aux Maharajahs, avec le phénomène très particulier des « presentation albums » (albums cadeaux) des Maharajahs, ainsi que des photos peintes, très différentes de celles que l’on connaît ailleurs dans le monde. La Fondation Alkazi qui les rassemble et les conserve depuis trente ans nous fait l’honneur de prêter pour la première fois une sélection significative de sa collection dans ces deux genres.
Il y aura aussi les travaux photographiques d’un grand bourgeois indien, merveilleux amateur du début du 20ème siècle dont le principal sujet est lui-même et ses filles, dont une deviendra d’ailleurs la peintre moderne la plus célèbre en Inde.
Ce choix alternatif de photographies s’élargit avec la collection d’Erik Kessels. Ce Hollandais, directeur artistique pour la publicité, commissaire d’expositions, est avant tout un grand collectionneur de photographie vernaculaire : albums de famille, images techniques, incongruités trouvées sur internet, constituent une collection exceptionnelle, très drôle et très tragique à la fois.
Le Museon Arlaten propose lui une vision de l’exode arménien au travers de photographies de studio, d’albums et de cartes postales.
Enfin c’est un véritable trésor qui sort des carnets Hermès de Pannonica de Kœnigswarter. Célèbre pour être la généreuse mécène du Jazz, cette riche héritière se révèle être une photographe amateur très libre. Elle côtoie pendant trente ans des musiciens de légende. Cette présentation inédite de 300 Polaroïds, montre ce qu’une passion peut avoir de charnel et devrait émouvoir bien au-delà des seuls amateurs de Jazz.
Magnum Photos
La plus belle agence fête son anniversaire. Seule agence internationale encore indépendante, Magnum tire son originalité de sa forme coopérative et de la totale autonomie de ses membres. La diversité des regards qui s’y croisent n’ont en commun que leur curiosité pour le fonctionnement de la planète. C’est un petit miracle que tant de fortes personnalités humaines et photographiques réussissent à maintenir cet outil de travail utopique malgré la diversité de leurs fonctionnements.
Officiels Deux exemples de photographies officielles sont confrontés : d’abord 81 ans de portraits officiels de la Reine d’Angleterre par de grands photographes collaborateurs de l’agence Camera Press, soit une série qui court sur la moitié de l’histoire de la Photographie ; ensuite, la photographie officielle du Président de la République française, l’image la plus diffusée en France et sans doute la série la plus monotone depuis l’invention de la photographie. Pour les Rencontres, plus de 40 photographes ont accepté le défi de rompre avec cette uniformité en imaginant la posture proposée à une éventuelle femme présidente, laissant ainsi libre cours à leur propre poésie.
Amis
Nous célébrons l’anniversaire d’amis des Rencontres : l’excellent festival PhotoEspaña dont nous fêterons les dix ans avec une exposition et un spectacle du photographe de la movida : Alberto Garcìa-Alix. Dix ans aussi de la Fondation HSBC pour la photographie, qui accomplit un travail remarquable de promotion par l’exposition et le livre.
Les soirées sont marquées par le spectacle visuel de Lou Reed et Julian Shnabel, et il est impossible de citer ici tous les évènements de cette édition, dont ce catalogue donne le détail.
La semaine d’ouverture est l’occasion d’un colloque sur la collection photographique, organisé avec l’École Nationale Supérieure de la Photographie, XXXXXXX d’Anne Cartier Bresson et le Centre Pompidou, précédé par une soirée autour du collectionneur Sam Wagstaff.
Le festival se développe, nous tachons de lui donner une couleur très différente chaque année, des activités nouvelles se greffent d’une édition sur l’autre. Toutefois nous restons vigilants et convaincus qu’une certaine fragilité et une remise en cause permanente des « formules qui marchent » sont le gage d’un intérêt renouvelé du public. Si d’aventure le sentiment d’avoir réussi nous tentait, nous sommes ramenés chaque année sur terre par de nombreuses incertitudes sur les lieux et les budgets, qui se combinent avec les salutaires angoisses des artistes et des collectionneurs. Face à cela, l’équipe des Rencontres fait preuve d’un enthousiasme et d’un professionnalisme qui ont peu d’équivalents et nos partenaires nous sont fidèles, représentant un soutien très précieux.
Je souhaite au public d’Arles, par ailleurs en croissance exponentielle, de trouver son lot de surprises et d’émotions dans ce programme, fruit de nombreuses sensibilités.
François Hébel, directeur des Rencontres d’Arles.