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Les petites illusions

08 Nov - 22 Nov 2008
Vernissage le 08 Nov 2008

Les photographies de Boris Chouvellon se présentent comme les fragments d’une réalité qui aurait accepté sa part d’onirisme.

Communiqué de presse
Boris Chouvellon
Les petites illusions

La pratique de Boris Chouvellon s’ancre dans l’art du déplacement. Pas un déplacement seulement physique mais un déplacement du regard. Il traque les ruines ou les derniers éléments visibles de la production et de ses flux. Pour cela, il va trouver ses matériaux dans les zones où se dessine ce type de paysages, les zones périurbaines où s’étendent de vastes mouvements entre entrepôts construits en matières légères – nous sommes ici loin des bâtiments en pierre des anciens docks des zones industrielles de la fin du XIXe et du début XXe siècle.

Il saisit le temps, celui qui semble déborder lorsque l’architecture se met à parler un langage autonome. Pour cela, il cherche la lumière qui permet de faire ressortir ses côtés plus implicites. La lumière permet de voir une réalité qui peut induire une fiction mais qui continue paradoxalement à souligner la réalité crue avec ce qu’elle a d’hallucinatoire.

Boris Chouvellon ne cherche pas à saisir une totalité mais pénètre le monde comme par l’envers du décor, celui qui concentre en des moments donnés des foules de consommateurs, celui des entrepôts et des réseaux qui les approvisionnent. De cette immersion dans ce monde naît un autre monde par le choix de l’artiste qui extrait des images de quelque médium que ce soit.

Les photographies de Boris Chouvellon cadrent sa vision d’observateur et d’interrogateur du monde.
Où observe-t- on aujourd’hui la réalité et comment se la réapproprier ? Tout en faisant le constat que les flux, tels ceux d’une machine, ne font que changer d’aiguillage et de programmation, il capte, par son regard, des visions issues d’un temps qui plonge ce qu’il observe dans la durée physique de l’homme et des cycles climatiques et journaliers.

C’est entre images et réappropriation du réel que se situe la pratique de Boris Chouvellon. Il filtre cet état de fait en proposant des interprétations ouvertes qu’elles soient sous forme de photographies, de sculptures, de dispositifs ou de vidéos. Cela peut se traduire par la mise en scène d’une action quotidienne et répétitive poussée jusqu’à l’absurde, par celle d’un gros outillage de chantier détourné afin d’effectuer un travail dérisoire et paradoxal.

Cette pratique débouche également sur des sculptures issues de ces mondes où l’économie de l’artiste rejoint celle des signes économiques les plus faibles afin d’en décaler les propos vers un questionnement sur le monde et ses mouvements ainsi que sur la place que peut y trouver l’homme.

L’envers du décor chez Boris Chouvellon n’est pas une vision en négatif mais elle donne naissance à une coloration différente, allant parfois jusqu’au non-sens, souvent humoristique, comme lorsqu’il se prend à construire une structure constituées de coupes de prix, sportifs ou autres, qui crée une foule d’images en miroir tout en renvoyant également à un miroir plus global. La coupe qui distingue un individu des autres est mise ici en abîme sous forme de motif. On voit dans un même temps la coupe isolée, une structure conçue d’éléments et l’on peut élargir la vision à une économie et au mode de production de toutes les coupes qui, tout en étant jamais les mêmes, finissent par se ressembler. On pense alors à la position du champion qui reçoit une coupe pendant qu’à la même minute dans la ville, la région voisine ou à l’autre bout du monde, un autre champion est distingué de la même façon avec le même type d’objet. Cette démultiplication des choses, leur prolifération provoque une sorte de dissolution où nous essayons d’articuler des éléments tangibles entre eux auxquels nous raccroche notre rapport physique au monde tout en pensant à toute la culture immatérielle flottante que le futur est sensé nous offrir.

Sans être dans l’ici et le maintenant permanent, dans le toujours présent que nous assigne notre période postmoderne, Boris Chouvellon offre des stratégies obliques permettant une certaine mise à distance sans pour cela rester dans la nostalgie post adolescente ni dans une position moderniste par trop académique. Ces propositions s’ouvrent sur la mémoire et ces oeuvres montrent un retour du refoulé historique dans ce qu’elles construisent et par rapport au monde auquel elles renvoient.

Si sa pratique s’empare de l’expérience physique dans tout ce qu’elle comporte ainsi que du déplacement du regard qu’elle induit, c’est afin de mieux entrevoir ce qu’il en est de nos paradoxes entre le corps conditionné, immergé dans un flux ininterrompu d’images et d’informations, et des ouvertures potentielles qui jouent sur la tension qui en résulte.

Que remet alors en jeu l’artiste lorsqu’il se tient là ? Peut-être des fragments du réel qui gèrent les paradoxes de points de vue entre la réalité et l’onirisme, la contemplation et leur part de poésie.
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