Camille Claudel, Louise Bourgeois, Kiki Smith, Jana Sterbak, Berlinde De Bruyckere
Les Papesses
«Mon côté féministe s’exprime par l’intérêt que je porte à ce que font professionnellement certaines femmes. Mais je fais cavalier seul. Cela ne m’est d’aucune aide de m’associer aux gens. Ce qui m’aide, c’est de comprendre mes propres maladresses et de les exposer. Les féministes m’ont prises comme modèle exemplaire de la mère. Être une mère à nouveau ne m’intéresse pas. J’ai été une mère adoptive puis mère et re-mère! Je demeure une fille qui cherche à se comprendre.»
Louise Bourgeois, 1984
«Je suis comme Peau d’âne ou Cendrillon condamnée à garder la cendre du foyer, n’espérant pas de voir arriver la Fée ou le Prince charmant qui doit changer mon vêtement de poil ou de cendre en des robes couleur de temps. Comment pouvez-vous dormir sur vos deux oreilles pendant que des quantités de femmes sculpteurs s’écrient: à l’aide, au secours, je me noie!»
Camille Claudel à Eugène Blot, 1904
La Collection Lambert en Avignon et Avignon Tourisme proposent une grande exposition conjointe: «Les Papesses».
Ce titre de l’exposition estivale renvoie à l’histoire de Jeanne la Papesse, cette incroyable légende médiévale antérieure à la venue des papes à Avignon. Un personnage érudit et charismatique venu de l’autre côté du Rhin fut élu pape et régna comme tel au IX ème siècle jusqu’à ce qu’on découvre que ce représentant de Dieu sur terre était enceinte. Lors d’une procession publique, l’enfant fut délivré prématurément en couche. Jeanne la Papesse et son enfant décédèrent sur l’ancienne place Saint- Pierre-de-Rome. L’imaginaire médiéval reprit cette histoire largement diffusée par le Décaméron de Boccace; aujourd’hui encore, une chaise percée permettrait à la fin d’un conclave de vérifier le sexe du pape nouvellement élu au Vatican pour ne pas renouveler la nomination d’une autre papesse…
C’est sous l’égide de cette figure emblématique qu’ont été sélectionnées cinq femmes artistes, telles des Papesses de l’art moderne et contemporain: Camille Claudel, Louise Bourgeois, Kiki Smith, Jana Sterbak et Berlinde De Bruyckere. Dans l’exposition, les œuvres dialogueront d’un lieu à l’autre (les œuvres monumentales au Palais des papes, les petites sculptures et œuvres sur papier à la Collection Lambert). Elles tisseront ensemble des liens esthétiques et thématiques: la filiation père-mère-enfant chère à Camille Claudel, Louise Bourgeois ou Kiki Smith, le corps en métamorphose — Berlinde De Bruyckere, Kiki Smith —, l’alchimie médiévale reliant les êtres et les planètes — Jana Sterbak, Kiki Smith, Louise Bourgeois… Toutes les cinq reprennent la tradition de la sculpture, souvent réputée pour être la plus difficile des pratiques (plus traditionnelles, marbre, terre cuite, plâtres, bronze, cire et contemporaines, tissus cousus, verre, céramique, papier mâché).