L’exposition « Les offrandes » à la Maison européenne de la photographie de Paris forme une vaste rétrospective de l’œuvre de Gao Bo, photographe chinois qui depuis plus de tente ans repousse les limites de sa discipline.
Le cheminement de Gao Bo, de la photographie à l’installation et à la performance
Suivant un parcours en quatre parties, l’exposition vise à retracer le cheminement à la fois conceptuel et plastique de Gao Bo. Elle explore ses différents thèmes de prédilection et reconstitue la progression d’un artiste qui a débuté sa carrière avec des portraits photographiques d’un grand classicisme pour ensuite franchir les limites de la photographie et la réinventer à travers l’installation et la performance.
La première partie de l’exposition s’intéresse aux œuvres que Gao Bo a consacrées au Tibet. C’est en effet par une série de portraits de Tibétains que le photographe a débuté sa carrière, en 1985. Ce premier voyage où il découvre sa vocation sera suivi d’autres au cours des années 1980 et 1990, à l’occasion desquels il poursuit sa mise en images d’un peuple dont il se sent à la fois très différent et très proche. Dix ans après la réalisation d’une centaine de ces clichés, Gao Bo, guidé par une sensation d’inachevé, les a retravaillés.
Dans cette série de photographies anciennes remaniées se situe l’évolution plastique de Gao Bo. Guidé notamment par l’exemple de Marcel Duchamp, il se lance dans un processus de remise en question de sa pratique photographique dont il perçoit les limites. Les tirages de ses premiers séjours tibétains deviennent la matière d’une démarche expérimentale : ils sont recouverts d’une écriture inventée avec des moines bouddhistes tibétains et tracée à l’aide d’encre, de peinture et du sang de l’artiste. Ainsi s’exprime de façon symbolique l’expérience autrement incommunicable de Gao Bo au Tibet.
Des expérimentations radicales explorent la destruction et la régénération des images
La deuxième partie présente une œuvre entre installation et performance, Offrande au Mandala, créée en 2016. Représentative des dispositifs monumentaux auxquels Gao Bo s’est consacré ces dernières années, l’œuvre revient elle aussi sur ses premières photographies traditionnelles pour mettre en lumière les effets du temps qu’elles ont subis. Des portraits dualité réalisés au Tibet dans les années 1990 sont présentés barrés d’une croix en néon rouge, puis successivement recouvertes de résine et de peinture noire et blanche, qui est finalement en partie enlevée. Ainsi se concrétise un processus de disparition et de réapparition partielle, telle un souvenir ou un spectre.
La suite du parcours reflète le questionnement de l’artiste autour des notions de disparition, de destruction, de reconstruction et de transfiguration. Une exploration qui emprunte des voies de plus en plus radicales, le processus créatif s’engageant lui-même dans l’acte de destruction pour mieux affirmer le pouvoir de régénération des images.