Katia Bourdarel, Lionel Sabatté
Les meutes
Si ces œuvres ont déjà cohabité, lors de l’exposition itinérante «La belle peinture est derrière nous», ce sera leur première confrontation frontale. L’œuvre de Katia Bourdarel est toujours le fruit d’un moment initiatique clef, de la fracture d’un équilibre primordial. Elle s’entoure d’une ménagerie étrange et d’êtres effrayants pour mieux nous questionner. Je suis une louve, lupa sum, hurle l’artiste. La meute de Katia Bourdarel rôde dans la galerie. Des louves noires, sombres, chtoniennes, qui pour mieux cacher leur fureur, se dissimulent, se travestissent sous des masques séduisants, brodés, faits de dépouilles de chasses antérieures. Entre attraction du premier instant et effroi de la confrontation, les louves de Katia Bourdarel gardent leur territoire. Mais, ne nous y trompons pas, l’artiste intègre ici certains grands mythes issus de la tradition gréco-romaine car avec leurs allures de courtisanes trop fardées, dévoreuses d’hommes, ces louves sont nos mères, elles ont élevé Apollon et Artémis, Romulus et Remus.
Parce qu’elle rend compte d’une vie passée, à l’état minéral ou organique, parce qu’elle est le résultat d’un processus permanent de décomposition, la poussière a une forte dimension existentielle. Celle que Lionel Sabatté utilise pour former la meute de loups présentée lors de ses expositions, est systématiquement prélevée à la station de métro Châtelet les Halles, lieu de forte affluence. Par cette récolte dérisoire, scrupuleusement datée, l’artiste rend visible les débris en suspension, leur donne une nouvelle matérialité, et trouve une forme plastique, concrète, au caractère insaisissable du temps qui passe.