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Les Captifs

Belle danseuse métisse formée au classique le plus pur et dur, Aline Okorokporo a trouvé refuge dans la pratique de la photo et de la vidéo, des médias qui lui permettent d’exprimer ce qu’elle a à dire ou qui ne peut pas l’être directement par le langage corporel.

La fusion chère à Aline Okorokporo mélange les genres et n’hésite pas à surimprimer plusieurs couches de signifiés. Trop, pour les uns, des cartésiens à l’esprit de géométrie. Pas assez, pour les adeptes de baroque n’ayant ni froid aux yeux ni crainte d’une surcharge de sens ou de saturation visuelle.

Un diaporama accueille le visiteur et propose une série de visuels — photos retravaillées avec quantité d’effets graphiques et de filtres par lesquels elles deviennent des palimpsestes — détaillant le visage de Vinio Gradzki en gros plans. Le jeune homme a été capté sous tous les angles. La bande-son diffuse le poignant Stabat Mater de Giovanni Battista Pergolesi, la dernière œuvre du musicien, mort tuberculeux à 26 ans, quelques semaines après l’avoir composée.

L’audiovisuel, présenté par l’auteure comme un «hommage aux captifs de tous temps et de tous lieux dont le seul crime fut de vouloir penser librement», est suivi d’un triptyque montrant un corps humain — celui de la danseuse — en position fœtale. Il s’agit de trois clichés agrandis et reportés sur toile au moyen du jet d’encre. Celui du milieu a été accroché la tête en bas, comme un tableau de Bazelitz.

La station qui suit ce «process» ou procession est consacrée à la collaboration d’Aline Okorokporo avec le peintre Erro. Celui-ci semble avoir pris son surnom au sérieux, au pied de la lettre, puisqu’il consacre une partie de ses dernières recherches au… Surfeur d’argent (Silver Surfer), super-héros inventé par Stan Lee et Jack Kirby en pleine période «Beach Boys».

Aline Okorokporo a filmé le peintre en train de prendre la position du personnage à la peau vernissée, aux luisances mercurielles et aux reflets solarisés. Elle a elle-même été photographiée dans des équilibres accroupis béjartiens (la fameuse pose «B» dont parlait Lifar) et juxtapose les images gracieusement offertes par son super-Erro à ses propres clichés.

Enfin, la jeune femme diffuse sur l’écran de son PC ses propres films en noir et blanc qui mettent en valeur son jeu de jambes et un travail acrobatique sur pointes faisant songer un peu à celui d’Aureline Roy. Nous en avons apprécié la réalisation qui est, ici, formellement parlant, des plus sobres. Pour ainsi dire pré-cinématographique. L’aspect saccadé et la touche expérimentale.

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