Les Artistes, sculpteurs d’humanité

— Éditeur(s) : Desclée de Brouwer, Paris
— Année : 2002
— Format : 20 x 13 cm
— Illustrations : aucune
— Page(s) : 100
— Langue(s) : français
— ISBN : 2 220 05095-5
— Prix : 14 €

Préface
par Robert Pousseur (extrait)

Berlin. Un nouveau musée présente des œuvres datant de la naissance du nazisme. Parmi cet ensemble, deux d’entre elles attirent particulièrement l’attention. Bien mise en relief, une sculpture présente un homme nu, à genoux, le dos courbé comme prêt à recevoir des coups. Cet homme paraît écrasé par le poids d’un invisible mépris. Juste à côté, une petite peinture met en scène quelques hommes grassouillets respirant la joie sadique de ceux qui utilisent la violence pour affirmer leur puissance; l’un d’eux a le crâne ouvert rempli d’excréments qui fument encore; un autre, marqué de la croix gammée, a un sourire méprisant. Pour réaliser ces deux œuvres dénonçant ce qui naissait sous leurs yeux, il a fallu beaucoup de lucidité aux artistes mais aussi une vision et surtout du courage. Ce courage, ils l’ont puisé en eux, là où bouillonne l’amour, là où naissent les cris de révolte.

Paris. Au cours d’une conférence publique, un conférencier dénonce, au nom de la Bible, ce qui abaisse, meurtrit, tue les hommes dans notre monde. Cet orateur illustre son propos en parlant notamment de Picasso comme d’un artiste qui s’est pris pour un dieu : « Il suffit de regarder ses tableaux qui montrent le corps humain souvent défiguré, cassé, recomposé. Ses peintures reflètent plus l’envie de recréer l’homme que de le respecter. »

En allant puiser au fond d’eux l’inspiration, en se nourrissant des bruissements du monde, les artistes du XXe siècle ont mis au centre de leur création l’homme, le corps de l’homme, sa chair. Cette aventure a été pour certains une véritable ouverture sur l’infini, une authentique expérience spirituelle.

En peignant avec mille couleurs ce qui bouillonne en l’homme, en extrayant de la roche une sculpture qui exprime avec beauté ce qui est enfoui en l’homme, en mettant l’homme au cœur de la création cinématographique ou théâtrale, en dansant une chorégraphie ou en mettant en musique ce que les mots ne peuvent traduire, les artistes ne laissent rien en l’état, ni les personnes, ni les peuples, ni les Églises.

En faisant voir ou entendre leurs œuvres, en les exposant jusque dans la rue, en suscitant l’admiration ou en provoquant, les artistes sculptent l’humanité.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions Desclée de Brouwer)

L’auteur
Robert Pousseur, prêtre du diocèse de Soissons, est secrétaire national de « Arts-Cultures-Foi » au service des évêques de France. Il a publié plusieurs œuvres aux éditions de l’Atelier et chez Bayard.