Éric Veillé
Le sens de la vie et ses frères
Editions Cornélius, Paris.Collection Louise.
Parution: Mai 2008
Non paginé, noir et blanc
Saurez-vous supporter un monde où les yahourts ont remplacé les livres? Où l’on part se faire conseiller des fonds de placement en slip? Où les messieurs restent assis dans les salles d’attente en attendant que leur pantalon se défroisse?
Ce monde, c’est celui que nous prépare Eric Veillé dans ces chroniques d’un autre âge, entre fable lunaire et délire surréaliste. Rangé dans un coin non loin des Glen Baxter et Pierre La Police. Dans un espace aménagé où le savoir-vivre vire sans prévenir dans le tourbillon du non-sens. Quand les situations les plus improbables viennent se nicher dans notre quotidien et renverser son confort moelleux.
Mais malgré l’effondrement quasi-permanent, malgré l’échec ou les petites victoires mesquines qui peuplent ces saynètes, l’essentiel est préservé. Le personnage principal d’Éric Veillé, sorte d’autoportrait malhabile, reste placide et digne devant l’adversité. Car accroupi sous un évier, il sera toujours plus important de refaire le carrelage plutôt que le monde.
Sous un évier ou dans la tête d’un poisson-trou, il s’agit toujours de faire l’autruche, de disparaître en silence autant que faire se peut. Pas d’épisode de gloire donc, pas d’autocongratulation démesurée: les acteurs chez Eric Veillé se saisissent des imperfections du monde et en tire la substantifique moelle poétique.
Jusqu’à en grossir les traits, jusqu’à gonfler les us et coutumes qui nous habitent, jusqu’à réintroduire le rire dans les Pyrénées. « Le sens de la vie et ses frères » peut être cruel, il sonne toujours juste et drôle.
Après tout, le pessimisme a également le droit d’être joyeux.