L’oeuvre, autant que la vie, de l’artiste new-yorkais Jean-Michel Basquiat (1960-1988) ont contribué à en faire un mythe. Toutes deux sont retracées parallèlement par un film et une exposition à Paris.
A partir du 15 octobre, le Musée d’art moderne de la Ville de Paris rend hommage à l’oeuvre de Basquiat. Une centaine de toiles et de dessins l’illustre de manière chronologique.
Le génie de Basquiat trouve un premier terrain d’expression sur les murs des quartiers Downtown de Manhattan à la fin des années 1970. A cette époque, loin de l’image actuelle, ce quartier de New York est l’un des plus touchés par le chômage, la misère et la drogue. Appartenant à la première génération de graffeurs, Basquiat commence par taguer à la bombe des messages poétiques, sous le pseudonyme SAMO (Same Old Shit).
Vers 1980, encouragé par quelques galeristes, il passe à la toile. Ses premiers tableaux sont inspirés par l’univers de la rue: voitures, bâtiments et policiers s’y côtoient.
Puis, l’artiste densifie ses tableaux avec des collages et des écritures énigmatiques, qu’il griffonne puis rature.
Enfin, les dernières années de sa vie voient l’apparition de thématiques plus engagées dans leur époque, telles que la défense de l’identité noire, la célébration du monde de la boxe et du jazz. Les sources se multiplient, tantôt populaires comme la bande dessinée et la publicité, tantôt sacrées comme les mythologies chamaniques et chrétiennes. La récurrence de figures squelettiques et masquées témoigne de son obsession de la mort.
L’expressionnisme et la virulence des couleurs de Basquiat sont vite remarqués, dans le contexte froid de l’art minimal et conceptuel. Andy Warhol, alors vedette du marché, le fait entrer dans le star system et collabore avec lui dans plusieurs peintures. Premier artiste noir à exposer à la Biennale du Whitney Museum de New York, Jean-Michel Basquiat est aujourd’hui devenu le symbole de la contre-culture des années 1980.
Quant à la vie de l’artiste, elle a fait l’objet de plusieurs films.
En 1981, dans Downtown 81 d’Edo Bertoglio, Basquiat joue le rôle principal d’un taggeur dans les rues du Lower East Side à New York.
En 1996, le peintre et cinéaste Julian Schnabel réalise un film de fiction, intitulé simplement Jean-Michel Basquiat et assorti d’un casting de choc (Jeffrey Wright dans le rôle principal, David Bowie dans celui d’Andy Warhol et Courtney Love dans celui de Madonna).
Le 13 octobre prochain, sort en salles Jean-Michel Basquiat: The Radiant Child, un documentaire filmé deux ans avant sa mort par son amie Tamra Davis. Au son des tubes Be-Bop de l’époque, on y découvre la vie trépidante de Manhattan, la culture underground mais aussi le racisme ambiant qui a tant fait souffrir l’artiste. On y relève ses traits de caractère essentiels: l’ambition forcenée et surtout la culture historique. Loin de la figure de l’artiste brut ou sauvage qu’on lui prêtait à l’époque et qui a continué de lui coller à la peau jusqu’à nos jours, Basquiat apparaît comme un artiste complexe, dont les muses sont Léonard, Picasso et William Burroughs. Loin de l’idée d’une carrière unanime, on y apprend la dureté de la critique d’art et des musées à son égard. Les images d’archives sont accompagnées de plusieurs entretiens posthumes des personnalités qui l’ont connu. Parmi celles-ci, figurent ses amis graffeurs Fab Five Freddy et Al Diaz, ses premiers galeristes Jeffrey Deitch et Larry Gagosian et son ami peintre Julian Schnabel.