Maike Abetz et Oliver Drescher travaillent à quatre mains et façonnent ainsi une œuvre toute en dualité nuancée. Si dans leurs toiles la musique se régénère sous forme d’images, le réel investit quant à lui un monde aux contours fantastiques et le passé se compose au présent. Rapprochements et juxtapositions de réalités et fantasmagories distantes tissent la trame d’un univers singulier revisitant ainsi une période qui rétrospectivement apparait comme spectaculaire et performante : les 60 et 70’s.
Par une savante imbrication de formes et de couleurs, les différentes figures sont ramenées au premier plan: point d’échappatoire dans ces toiles saturées où le vide, et non point le néant, ne trouve pas sa place. Pin-up plus ou moins dénudées, guitares, synthés, pellicules photos mais aussi rats, pigeons, canettes de coca jonchent ainsi l’espace pictural, sans grande cohérence apparente.
A y regarder de plus près, l’on pourrait songer à une pochette de disque, à de la BD ou autre photomontage si cher à cette époque. Une telle imagerie composite, héritée de l’enseignement de Jorg Immendorf aux beaux-arts de Düsseldorf, s’amplifie par la récurrence des motifs dont elle s’abreuve : les codes sont ici magnifiés et constituent autant de rebus qui nous sont donnés à décoder. Nombreux et disparates, ils plantent par la même occasion un décor à la fois onirique et théâtral, un écrin indistinct.
«La peinture a la possibilité de créer du son» a déclaré de couple d’artistes. Va-et-vient incessant entre musique et picturalité, imagination et réalité c’est bien ce que nous proposent de telles toiles aux titres évocateurs tels que Who Met Who ou encore The Acid Hours. Si la musique évoque des images, ces dernières peuvent, quant à elles, se matérialiser en représentations. En découle un processus créatif riche en clins d’œil, aux références multiples, qu’elles soient historiques ou artistiques, toutes unifiées à coup de pinceaux.
Des éléments d’architectures «tubistes» côtoient ainsi des citations à l’art pop telles que Whaam ou Bam. Parfois même, à en juger crânes et autres troncs de pommes ou matières en décomposition, l’on pourrait songer à des vanités réactualisées. Mais entrevus sous le prisme de la culture rock, ces éléments se gorgent d’une toute autre signification urbaine. Prolixes et psychédéliques, ces toiles télescopent aspirations profondes et quotidien prosaïque, culture populaire et art savant.
Elles reconstituent avec un soupçon de nostalgie un portrait sonore d’une époque alors vierge de toute stratégie marketing. Un âge d’or en somme, rendu ici atemporel, universel … Out of time.
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Maike Abetz et Oliver Drescher
— Der Schlüssel Zur Architectur Von Heute, 2008. Acrylique sur toile. 220 x 270cm.
— We Met Who?, 2008. Acrylique sur toile. 130 x 150cm.
— Sans Titre, 2008. Acrylique sur papier. 55 x 75cm.
— Sans Titre, 2008. Acrylique sur papier. 55 x 75cm.
— The Acid Hours, 2008. Acrylique sur toile. 270 x 220cm.
— Counterblast, 2008. Acrylique sur toile. 260 x190cm.