La Galerie Loevenbruck expose le lauréat du Prix Marcel Duchamp 2006, Philippe Mayaux, un artiste éclectique qui s’intéresse à la fois à la nature des sciences, aux philosophies du mouvement, aux politiques individuelles, à la psychanalyse du chaos, à l’écologie de la raison… Ses intérêts aussi divers qu’inattendus le mènent aujourd’hui à concevoir une exposition intitulée «Le destin des fantômes».
Le titre de l’exposition n’est pas usurpé car il plonge le spectateur dans un univers très singulier. Et cela n’est pas le moindre de ses mérites. Cette impression est immédiate avec un lien extérieur / intérieur étonnant.
Au centre de la galerie, l’artiste a placé, très visible depuis la rue, un arbre noir aux branches nues sur lesquelles sont articulés, sur support mobile, divers personnages-fantômes d’une blancheur éclatante.
Tandis que des arbres situés à l’extérieur se reflètent dans la vitrine de la galerie avec leurs branches également dénudées en cette saison hivernale, renvoyant une analogie très forte et troublante avec l’œuvre de l’artiste.
Pour renforcer cet effet, sont placés dans la vitrine des visages blancs regardant vers l’extérieur, fantômes-masques munis d’un loup, traversés de part en part par une trompette ressortant de la bouche. Ces trompettes de la mort (de l’Apocalypse) semblent s’adresser au monde des «vivants» et nous inviter à pénétrer dans cet autre monde, celui de la galerie.
A l’intérieur, à proximité de l’arbre, une sculpture-montage d’organes au cÅ“ur desquels brille une petite lumière rappelle que la vie n’est pas encore — et jamais? — finie…
Philippe Mayaux souhaite-t-il renvoyer aux «fantômes du paradis»? En toute hypothèse, ces spectres nous parlent quelles que soient leurs formes et actions: visages, organes, couples aux longues chevelures blanches semblant flotter dans l’air… Cet autre monde vit et semble nous inviter à le rejoindre.
Plusieurs tableaux complètent cette exposition en deux assemblages différents.
Le premier est composé de quinze tableaux formant ensemble un œil. Ces œuvres ont toutes leur lot d’étrangeté, et se répondent par leurs tonalités pastel. Se côtoient par exemple un étrange personnage accroché à une branche et aux pieds tels des mains avec un acrobate très déconcertant puisqu’uniquement formé de jambes.
Au fond de la galerie sont disposés d’autres tableaux répondant par assemblage à de petites statuettes. Tout cet espace est marqué par de ténébreuses couleurs. Un effet graphique perturbant sépare deux mondes: un monde diaphane et immaculé, peuplé de fantômes aux chevelures évanescentes et un autre sombre, peuplé de statuettes primitives et d’images terrifiantes telles des maisons en flammes. Peut-être l’artiste veut-il signifier que nous, spectateurs et public, sommes les fantômes d’un monde en ruine qui présage du monde futur ?
Finalement, le destin des fantômes, notre destin, n’est pas effrayant. Serait-il attirant ? Venez en juger par vous même car avec une vraie économie de moyens, l’artiste nous convie à un voyage fascinant.
Publications
Construire – Elever la matière. 16e biennale internationale de céramique. Chateauroux, Musée de Châteauroux, Châteauroux, 2011
De leur temps (3), 10 ans de création en France : le prix Marcel Duchamp, Editions Archibooks, Paris, 2010.
Casanova forver, Editions Dilecta et FRAC Languedoc-Roussilon, 2010.
Anne-Marie Charbonneaux, Les vanités dans l’art contemporain, Edition Flammarion, Paris, 2010.
Å’uvres
— Philippe Mayaux, Les fantômes de l’autorité, 2012. Impression 3D, laiton, bois, MP3. 195 x 25 x 25 cm
— Philippe Mayaux, Les fantômes de l’autorité, 2012. Impression 3D, laiton, bois, MP3. 195 x 25 x 25 cm
— Philippe Mayaux, Queen of France, 2010. Crayon de couleur sur papier. 32 x 24 cm
— Philippe Mayaux, Les fantômes de l’autorité (le dictateur), 2012. Résine stéréolithographique, métal, lecteur MP3, enceinte (Bande son : Philippe Mayaux, Jean Noël Yven). 172 x 24 x 36 cm
— Philippe Mayaux, Idoles, 2012. Résine stéréolithographique, métal, brique, pierre. 33,5 x 11,5 x 9,5 cm. 32 x 11,5 x 9,5 cm. 32 x 11,5 x 9,5 cm
— Philippe Mayaux, Night City, 2011-2012. Tempera sur toile. 24 x 33 cm
— Philippe Mayaux, Le destin du décor, 2011-2012. Tempera sur toile. 22 x 27 cm
— Philippe Mayaux, Les défiantes, 2012. Résine, bois, métal, filasse, lecteur MP3, enceinte. 265 x 190 x 145 cm
— Vue de l’exposition Le destin des fantômes, Galerie Loevenbruck, 2012