— Éditeur : École nationale supérieure des beaux-Arts, Paris
— Collection : Écrits d’artistes
— Année : 2003
— Format : 20,50 x 14 cm
— Illustrations : aucune
— Pages : 445
— Langue : français
— ISBN : 2-84056-095-X
— Prix : 19 €
Préface
par Marie-Anne Sichère et Didier Semin (extrait, pp. 11-13)
Cette édition est conforme au principe général de la collection, qui privilégie la réédition d’écrits déjà publiés mais devenus introuvables, ou la traduction d’ouvrages inédits en français: tous les textes de Klein que l’on trouvera ici ont été édités, de son vivant ou après sa mort, en tout ou en partie. Mais nous avons introduit un petit changement dans le parti pris qui était jusqu’ici le nôtre, de publier les textes bruts, sans appareil critique particulier, de manière à laisser toute la place à l’expression des seuls artistes. Dans le cas de Klein, semblable choix eût été une commodité trompeuse. Il n’a pas eu le temps, on le sait, de mettre en ordre ses nombreux manuscrits. Le projet qu’il avait d’une anthologie (il l’évoque à de nombreuses reprises sous différents titres : « Mon livre », « L’aventure monochrome », « Le vrai devient réalité »…) est resté en suspens, et les Archives Yves Klein — dont nous voudrions redire ici à quel point elles nous ont réservé un accueil chaleureux et soutenus sans réserve — conservent, pour chacun des textes édités, plusieurs brouillons ou mises au propre sur papier pelure qui donnent des leçons parfois très sensiblement différentes. Klein pratiquait volontiers ce qui ne portait pas alors le nom de « copier /coller », et des paragraphes entiers peuvent se retrouver à l’identique dans des contextes apparemment sans rapport et à des dates diverses. Un même texte a pu de la sorte être publié sous plusieurs titres, selon le choix des éditeurs, ou avec de très considérables variantes; parfois, des anthologies de fragments sont présentées dans les catalogues comme des passages cohérents.
Ajoutons à cela que les écrits de Klein sont souvent orientés en fonction de circonstances précises qu’il est capital de connaître pour comprendre tels écarts de ton ou de style — ceux qui peuvent exister par exemple entre la conférence à la Sorbonne, ou le « Manifeste de l’hôtel Chelsea », destinés à être prononcés devant un public, et la très curieuse expérience de « rêve éveillé » conduite un soir de 1961 dans la solitude d’un appartement devant un magnétophone, publiée sous le titre de « Dialogue avec moi-même ».
Bref, il nous a semblé qu’il était rigoureusement impossible de nous dispenser d’un petit appareil de notes en fin d’ouvrage, où le lecteur — que nous supposons toutefois averti de l’essentiel du parcours d’Yves Klein — pourra trouver les quelques éléments d’information indispensables touchant au choix de la leçon retenue, aux circonstances de l’écriture du texte, aux hypothèses concernant sa datation, ainsi que des renvois à des fragments, eux souvent inédits, qui en éclairent ou complètent un aspect important. Les textes sont placés dans l’ordre chronologique, sauf exception signalée en note, un ordre tributaire de multiples incertitudes quant à la datation exacte de nombreux documents, et qui comportera sa part d’arbitraire.
Klein écrit en autodidacte: il use et abuse des guillemets sans donner de référence précise, cite parfois sans guillemets — mais jamais dans le propos délibéré de tromper — et avec approximation. Maintes fois nous nous sommes cassé les dents sur des guillemets énigmatiques, et des citations non repérées nous ont certainement échappé. Il arrange parfois les dates à son avantage, ne déteste pas non plus brouiller les pistes. Chaque fois que nous l’avons pu, nous avons tâché d’éclaircir ces pistes pour le lecteur, mais il reste beaucoup à faire. Son appareil de notes ne fait pas de la présente édition une véritable édition critique : le chantier d’une édition des écrits complets de Klein, comprenant la correspondance et surtout le journal — dont nous n’avons retenu que les parties éditées et quelques éditions en notes — reste ouvert. Il est gigantesque.
(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions de l’Ensba)
L’artiste
Yves Klein (1928, Nice — 1962, Paris), membre fondateur du groupe des Nouveaux Réalistes en 1960, est considéré aujourd’hui comme l’un des principaux artistes de la deuxième moitié du XXe siècle.
Judoka professionnel, nourri de pensées rosicruciennes, il commence par enseigner le judo. Bien que ses parents pratiquent la peinture, il y vient lui-même relativement tard et en autodidacte. Il expose pour la première fois, à Paris en 1955, des tableaux monochromes de différentes couleurs. Il franchit une étape décisive, dans cette « aventure monochrome », en 1957, quand il met au point le bleu IKB (International Klein Blue), dont il dépose le brevet et qui matérialise pour lui « la couleur de l’espace même ». De 1957 à 1962, il l’applique sur des tableaux, des reliefs, des objets, et des modèles, « pinceaux vivants » qui fixent leur empreinte sur la toile lors de chorégraphies (série des Anthropométries). Sa recherche d’imprégnation de la matière par l’énergie spirituelle rejoint alors son intérêt pour les doctrines rosicruciennes.
Les différentes étapes de sa brève carrière sont autant de jalons de sa quête de l’immatériel : exposition « Le Vide » (présentation de la galerie Iris Clert entièrement vide), « Architecture de l’air », « Cosmogonies », « Zones de sensibilités picturales », « Le Saut dans le vide », invitent le spectateur à entrer dans un monde sans dimension.