Le «Dehors absolu» de Thibaut Cuisset, présenté à la galerie les Filles-du-Calvaire, montre des paysages photographiés en Islande et dans le désert du Namib, «Deux territoires non modelés par l’homme».
Dans le cadre de résidences artistiques, d’aides à la création ou de commandes, Thibaut Cuisset parcourt le monde à la recherche de territoires susceptibles de répondre à sa quête d’absolu – au-delà de toute volonté de documentation géographique ou d’esthétisation de la nature.
Son but est d’atteindre au paysage idéal, par delà le pittoresque, le sublime romantique ou la mise en scène dramatique : «Éliminer le pittoresque, le sentiment, le pathos pour essayer d’être à une certaine distance, une distance qui reste généreuse et ne produise pas une image glacée» (2003).
Pour cela, il joue avec les variations de la lumière et de la couleur: pas de contrastes trop forts ni de couleurs trop vives, tout est affaire de finesse, de légèreté et d’équilibre. La notion d’équilibre est au centre de son travail, afin de garder la bonne distance et d’éviter tout effet spectaculaire. Le point de vue frontal est privilégié et la ligne d’horizon toujours placée au centre. Coupant symétriquement en deux les photographies, séparant nettement la terre et le ciel et par sa position fixe, elle invite à la contemplation, paisible et calme, du paysage.
De plus, la matière matte, qui fait parfois étrangement ressembler des photographies à des peintures ou des dessins, accentue la dimension sereine de la nature. On pense à la technique du sfumato élaborée par Leonard de Vinci, tant certains contours présentent un aspect vaporeux, mais aussi en raison de la présence de nuages au-dessus des cimes.
Cet aspect légèrement flou des paysages confère aux clichés un aspect graphique, et en conjure la froideur. La nature n’est ni magnifiée, ni dramatisée, elle est tout simplement naturelle.
Hormis quelques traces de vie (chevaux, câbles électriques, grilles d’élevage de poissons) la présence humaine et animale reste très faible, ce qui contribue à la quiétude des images. Sur certaines d’entre elles, des buissons (Environs de Solitaire, désert du Namib, 2000), des rochers (Environs de Kirkjubæjarklaustur, Islande, 2000), des pierres (Snaefellsnes, Islande, 2000) présentent les mêmes formes que le monde de l’animal et de l’humain. Ainsi tous les règnes de la nature apparaissent-ils liés et au même niveau.
Enfin, le choix du format des photographies révèle à nouveau la volonté de ne pas impressionner le spectateur, mais de l’inciter à observer, scruter, admirer. Par exemple, dans Jökulsárlón, Islande (2000) une mer gelée sur laquelle s’entrechoquent des plaques de glace rappelle le célèbre naufrage de l’espoir de Caspar David Friedrich. Mais loin de vouloir donner cette impression de la supériorité de la nature sur l’homme, de sa dimension tragique et redoutable, Thibaut Cuisset nous incite à contempler ce paysage calme et tranquille, que rien ni personne ne vient perturber.
Thibaut Cuisset
— West Coast, désert du Namib, 2004
— West Coast, désert du Namib, 2004
— Skeleton coast, désert du Namib, 2004
— Sossusvlei, Namib Naukluft Park, désert du Namib, 2004
— Sigöldustöd, Islande, 2000
— Eyjafjallajökull, Islande, 2000
— Environs de Höfn, Islande, 2000
— Jökulsárlón, Islande, 2000
— Environs de Solitaire, désert du Namib, 2000
— Environs de Kirkjubæjarklaustur, Islande, 2000
— Eiyjafjallajökull, Islande, 2000
— Cercle polaire, océan arctique, Islande, 2000
— Rivière Skjà lfanda.jót, Islande, 2000
— Environs de Vik, Islande, 2000
— Skeleton Coast, désert du Namib, 2004
— Tirasberge, désert du Namib, 2004
— Skeleton Coast, désert du Namib, 2004
— Environs de Lüderitz, désert du Namib, 2004
— Environs de Lüderitz, désert du Namib, 2004
— Skeleton coast, désert du Namib, 2004
— Torra Bay, Skeleton Coast, désert du Namib, 2004
— Recreation area, désert du Namib, 2004
— Dikwillem, Naukluft Park, désert du Namib, 2004
— Environs du Langjökull, Islande, 2000
— Îles Féroe, 2000
— Snaefellsnes, Islande, 2000
Chaque : Tirages couleurs RC procédé RA4, dimensions variables