Franz Erhard Walther
Le Corps décide
Déployée dans la nef et les galeries sur plus de 2000 mètres carrés, l’exposition monographique que le CAPC musée d’art contemporain de Bordeaux consacre à l’Å“uvre pionnière de l’artiste allemand Franz Erhard Walther constitue la plus vaste présentation à ce jour en France de ce travail fondamental qui se situe à la croisée de la sculpture minimaliste, de l’art conceptuel, de la peinture abstraite et de la performance.
Réunissant plus de deux-cents Å“uvres de 1957 à 2014, l’exposition, à caractère historique et rétrospectif, se focalise sur les manières dont l’artiste a, en impliquant le corps dans ses formes — les faisant ainsi varier à l’infini — pensé la relation entre sculpture et action, architecture et représentation. Un réservoir de formes qui placent le visiteur dans l’épreuve instinctive du seuil, à la fois devant et dans l’Å“uvre.
Ces propositions sculpturales sont axées sur la production de formes élémentaires alliées à des spéculations conceptuelles repensant de manière radicale la relation entre sculpture et action. Les formes en tissu — résultant d’une pratique élaborée dans les années 1960 alors que Franz Erhard Walther était encore étudiant — mettent le visiteur au seuil de l’œuvre.
Son œuvre 1.Werksatz (First Work Set, 1963-1969), composée de cinquante-huit éléments en tissu sur lesquels sont cousus des poches, des plis et des capitonnages, introduit les notions cruciales d’interaction et d’usage. Car ces formes sont susceptibles de varier et sont activables par l’action ou par l’imaginaire du visiteur. L’artiste les qualifie d’ailleurs «d’instruments de processus». Et comme il l’explique, «Ce moment de manipulation et d’action — en sa qualité d’élément constitutif de l’œuvre ou d’œuvre elle-même — est devenu [son] thème principal. L’idée fondamentale est de construire une œuvre à partir de l’action».
L’exposition illustre ainsi les réflexions de l’artiste sur ce qu’une œuvre d’art peut déclencher au delà de ce qu’elle est. Pour Franz Erhard Walther, l’œuvre est un réservoir de formes et c’est au visiteur d’activer cette potentialité, en donnant forme à ces formes.
A travers plus de deux cents œuvres et une documentation photographique conséquente, «Le Corps décide» attire enfin l’attention du visiteur sur une typologie d’objets d’art qui requière sa participation, conférant au public une responsabilité dans la création-même de l’œuvre. Ces objets — tels qu’ils sont définis par l’artiste — sont donc à activer par le public, démontrant de fait que l’artiste et le visiteur peuvent partager une expérience artistique exigeante mais généreuse.