Glen Baxter, Philippe Bazin, Anne Brégeaut, Philippe Cognée, François Daireaux, Gaël Davrinche, Jean-Jacques Dumont, Joan Fontcuberta, Gregory Forstner, Charles Fréger, Olivier Goulet, Hippolyte Hentgen, Jason Karaïndros, Farida Le Suavé, Olivier Leroi, Natacha Lesueur, Iris Levasseur, Isabelle Lévénez, Rémy Marlot, Javier Pérez, Françoise Pétrovitch, Paul Pouvreau, Jorge Queiroz, Annelise Ragno, Hugues Reip, Anne-Marie Schneider, Jana Sterbak, Ji-Yeon Sung, Jeanne Susplugas, Barthélémy Toguo, Patrick Tosani, Yves Trémorin
Le Beau est toujours bizarre
Bizarre, non? Il suffit de parcourir l’ensemble des acquisitions du Frac Haute Normandie qui ont été effectuées au cours des trois dernières années pour s’apercevoir que la plupart présente un certain degré d’étrangeté. Résultat escompté d’une concertation? Non, du moins à ce qui réglait le choix qui en avait été envisagé. Simple fruit du hasard, alors? Possible, les effets d’époque sont toujours insondables. Déviation personnelle du regard ? Sans doute, mais pleinement assumée tant il est vrai que l’expérience de l’art ne doit jamais nous laisser indemne.
Dans un monde banalisé, standardisé et stéréotypé comme le nôtre, rien d’étonnant que le bizarre occupe une telle place chez les artistes contemporains. Tout en le commentant, il leur permet de dire le monde autre qu’il est. De le projeter dans un ailleurs qui opère sinon comme un refuge, du moins qui l’envisage prospectivement. Éloge de l’étrange et de l’incongru. Le regard a toujours besoin d’images décalées et l’esprit d’aventures mentales inédites.
Quelle que soit leur nature –peinture, sculpture, dessin, photo, vidéo ou installation–, les œuvres des artistes qui sont ici rassemblées ont été choisies en fonction de leur qualité intrinsèque à surprendre le regardeur, que ce soit par leur contenu narratif ou par leur processus de création. Dans tous les cas, pour ce qu’elles mettent en question le réel et ses conventions, qu’elles tiennent tant au pouvoir de l’imagination de leurs créateurs qu’à la capacité du regardeur à y investir la sienne.
Ainsi, les desseins noirs d’Hugues Reip ouvrent sur un monde vrillé et irrationnel, tout à la fois poétique, fantastique et ludique, qui entraîne le regard de l’autre côté d’un miroir imprévisible.
Dans le silence glacé de leur matérialité, les photos de Ji-Yeon Sung nous obligent à un face à face tellement silencieux qu’il instruit une atmosphère inquiétante et mystérieuse.
Les personnages de Gregory Forstner et de Charles Fréger renvoient à l’esthétique existentielle du masque pour ce qu’elle détermine l’Autre à l’ordre d’un insondable.
Le bizarre ou la possibilité d’un ailleurs.