ÉCHOS
05 Nov 2010

L’art contemporain dans le filet des grandes marques

PElisa Fedeli
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L’intégration de l’art contemporain dans le projet d’entreprise des marques de luxe est de plus en plus fréquente depuis quelques années. Cette association prend des formes variées. Si l’art a pour fonction de communiquer, doit-il pour autant devenir un instrument de vente?

La tradition étatique de la France dans le champ culturel aurait pu freiner les esprits en matière de mécénat. Pourtant, nombre d’entreprises ont su investir dans la culture, et particulièrement dans l’art contemporain, en parrainant des expositions, des foires et des lieux d’art. Elles en ont vite compris les retombées positives: à travers cette association, elles peuvent non seulement faire événement pour augmenter leur visibilité et renforcer la cohésion de leur personnel, mais aussi forger une identité originale pour mieux se distinguer de leurs concurrents.

Le marketing cherche en effet à faire peau neuve, en s’appropriant les valeurs habituellement associées au monde de l’art: la créativité, la nouveauté, la radicalité. Les formes qu’il développe sont de plus en plus variées ces dernières années.
D’abord, il y a des soutiens ponctuels, comme les prix. La marque automobile Audi décerne pas moins de quatre prix par an, les Audi Talents Awards en art contemporain, design, musique et court-métrage. Conseillée par des professionnels de l’art, l’entreprise choisit un lauréat, dont elle finance l’achat d’une oeuvre ou la production d’une exposition. Les Champagnes Henriot ont quant à eux décidé de financer chaque année l’édition d’un catalogue d’artiste.
Puis, les marques peuvent confier aux artistes la construction de leur image. Les lignes de produits et les boutiques signées par des artistes se multiplient. Louis Vuitton a montré la voie, en invitant Takashi Murakami à customiser ses sacs et ses porte-monnaie.
Enfin, certaines formes marketing sont envisagées dans la durée. Les fondations d’entreprise font preuve d’un véritable engagement en faveur des artistes qu’elles suivent. Isolées dans un bâtiment, elles sont généralement éloignées de l’esprit pur et dur de la vente. Cartier et Ricard ont initié ce mouvement, se dotant d’une équipe et de locaux permanents pour organiser toute l’année des expositions temporaires d’art contemporain. La maison Prada a elle aussi créé à Milan sa propre fondation, dont la direction artistique est assurée par le célèbre théoricien de l’Arte Povera, Germano Celant.
D’autres enseignes, souvent issues du secteur bancaire et du luxe, se sont métamorphosées en collectionneurs. La Société Générale et les Galeries Lafayette sont chacune propriétaires d’un ensemble de près de 300 pièces d’art contemporain. La loi Aillagon de 2003, qui encourage l’achat d’oeuvres d’art par des réductions fiscales, n’y est certainement pas pour rien.

Toutes ces formes mettent en évidence le rôle de l’art contemporain dans l’expression de la culture d’entreprise.

Et l’artiste dans tout ça? Loin d’être en reste, travailler pour une grande marque lui assure d’emblée une visibilité importante, une accessibilité auprès d’un large public et un réseau de contacts fortunés.

Le monde de l’art et celui de l’entreprise partagent-ils vraiment des valeurs communes ou, au contraire, s’instrumentalisent-ils réciproquement pour arriver à leurs fins respectives?

Lire sur paris-art.com:
A propos des Galeries Lafayette

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