Communiqué de presse
Lars Englund, Timo Nasseri
Lars Englund, Timo Nasseri
Dans le catalogue de la grande exposition rétrospective de l’artiste suédois Lars Englund, il y a plusieurs centaines de croquis, de schémas et de courbes. Cet ensemble de pages est, curieusement, ce qui permet de comprendre la proximité entre le travail de deux artistes, Lars Englund et Timo Nasseri, dont la culture, l’âge et le parcours sembleraient empêcher une telle parenté. Le premier est un des artistes phare de la Suède des années soixante et soixante-dix et dont la pratique est à présent historique; l’autre est un jeune artiste, fils d’une mère allemande et d’un père iranien, établi à Berlin.
Ils sont réunis dans une exposition, pour la première fois, à la galerie. Les dessins en question révèlent les principaux aspects de l’oeuvre de Lars Englund, qui structurent celle de Timo Nasseri également: une obsession de la structure, une recherche formelle qui puise son abstraction dans les éléments structurels de la construction, des matériaux et de la relation dynamique des formes.
En effet, Englund et Nasseri ont tous deux recours à l’abstraction mathématique pour mettre en relation des formes dont la structure est élaborée selon des règles tout aussi rigoureuses que poétiques. Leur oeuvre nous met directement en rapport avec le monde et une forme de pensée philosophique qui en rend compte. Englund et Nasseri ont également en commun une prédilection pour la recherche de matériaux contemporains qu’ils replacent dans une tradition géométrique à la fois contemporaine, en référence à l’histoire de l’art du XXe siècle, et primordiale, faisant penser aux mathématiques, dont Aristote rappelle l’origine oisive et ludique (donc pas spécialement fonctionnelle et plutôt dans le terrain de l’esthétique et de la connaissance).
Ainsi leur recherche formelle est un outil d’exploration du monde et de l’esprit humain. Leur intérêt pour des matériaux inhabituels, peu explorés (comme le polycarbonate ou l’acier poli) ou bien des matériaux de construction auxquels ils donnent une allure nouvelle, apporte un élément unique à leur travail, une sorte d’universalité hyper-actuelle. Les oeuvres Pars pro toto («la partie pour le tout» en latin) que Lars Englund a présentées en 1978 au Pavillon Nordique à la Biennale de Venise, ont été reproduites en anaglyphe dans le catalogue et pouvaient être regardées avec les lunettes 3D.
Timo Nasseri nous habitue, à la galerie, à des recherches mathématiques qu’il applique à des dessins complexes faits au marker à même le mur par exemple, et qui sont le «négatif» de ses sculptures en creux très remarquées, Epystrophy. Cette exploration du passage entre l’image et le volume se trouve au coeur de l’histoire de l’art mais aussi des outils de communication de notre société.
Dans leur exposition en commun à la galerie, Lars Englund présente des tableaux de la série «Polychromes», des tableaux-sculptures à répétition organique. Il y aura aussi des sculptures de l’ensemble intitulé Entanglements, à l’aspect à la fois industriel et organique, dont la dynamique tient à l’association de tiges en acier poli pointant dans différentes directions. Timo Nasseri, quant à lui, propose de nouvelles sculptures, dont Allotropy (de la même famille que celle qui lui a valu le Prix Abraaj cette année) et qui emploie la même dynamisation de la forme à travers la superposition décalée de tiges en métal.
Le processus est un élément essentiel dans l’oeuvre des deux artistes: les calculs, la transposition, l’assemblage, font l’oeuvre. L’abstraction crée ainsi une ouverture vers un espace et une dimension autres où mathématiques, biologie, éthique et politique se retrouvent dans leur rapport à la position du spectateur, ce que la sculpture Glance, de Timo Nasseri, à la fois théorème, masque et miroir, incarne à merveille.