L’archevêché d’Avignon exige le retrait d’une œuvre d’Andres Serrano, alors qu’elle est présentée depuis plusieurs mois à Avignon dans l’exposition-anniversaire de la collection Lambert, «Je crois aux miracles».
L’œuvre en question est la photographie Piss Christ (1987) qui représente un crucifix immergé dans de l’urine. Derrière l’apparente provocation du sujet, se profile une réflexion profonde de l’artiste sur la place de la dévotion dans la société contemporaine.
Pour l’évêque d’Avignon, Jean-Pierre Cattenoz, il s’agit d’une image purement et simplement blasphématoire, dont «Le côté odieux bafoue l’image du Christ sur la croix».
Faudrait-il passer au crible de la morale religieuse toutes les œuvres qui en détournent les symboles? Non, le délit de blasphème n’existe plus dans le droit français depuis 1881. Dans la liberté d’expression, la loi inclut la critique des religions, la seule limite étant qu’il ne faut pas viser les personnes.
Piss Christ fait régulièrement l’objet de ce genre de polémique: en 1989, alors qu’elle reçevait un prix du centre d’art contemporain de Caroline du Nord, les milieux puritains américains l’attaquaient vivement. Hier comme aujourd’hui, force est de constater que ceux qui désapprouvent l’œuvre de Serrano sont des intégristes catholiques, le plus souvent affiliés à l’extrême-droite. L’archevêché d’Avignon est en effet proche des associations Civitas et AGRIF.
Il y a quatre ans, Piss Christ était pourtant présenté à Avignon, sans susciter l’ire de personne. Qu’y a-t-il de si différent aujourd’hui? Certainement un climat politique propice au retour autoritaire de la morale plutôt qu’au jugement critique de chacun.
La multiplication actuelle des tentatives de censure à l’encontre de l’art contemporain — dont les plus récentes sont les affaires Larry Clark et «Présumés innocents» — est un signe des plus alarmants.
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