Art Orienté Objet
L’Alalie
Le duo Art Orienté Objet est créé il y a une quinzaine d’années par Marion Laval-Jeantet et Benoît Mangin. Dès le début il se rapproche d’artistes comme Mark Dion, qui les invite à ses côtés dans des expositions de groupe.
Pour le Magasin ils conçoivent une exposition titrée « L’Alalie » Le titre choisi, qui est celui de l’une des pièces principales, désigne un moment «d’aphasie», cet instant où l’on ne parvient plus à parler, où tout semble s’arrêter.
L’exposition regroupe un ensemble de pièces dont la plupart sont créées pour l’occasion et qui sont soumises à un protocole expérimental scientifique et technique, qui fait évoluer leur forme pendant la durée de l’exposition ou la fait même disparaître dans certains cas.
L’exposition témoignera de cette impression croissante que, fasse aux enjeux écologiques actuels, nous ne sommes plus en présence que de contradictions perpétuelles. Peut–on encore agir?
Chaque pièce est présentée comme un oxymore qui se joue du rapport entre attirance et répulsion ressenti par le spectateur. Chaque oeuvre fabriquée agit comme un arrêt sur image, qui témoigne d’une contradiction si forte qu’elle en devient vertigineuse.
Marion Laval-Jeantet et Benoît Mangin, définissent ainsi le projet « L’Alalie »: «Dans le monde du Vivant où l’homme fait figure de prédateur terminal, nous voudrions proposer un scénario d’anticipation où l’artiste laisse la parole en suspens pour n’offrir que des oeuvres ayant trait au vertige existentiel de la disparition et de la mutation. Le terme le plus juste pour définir cet état serait pour nous «l’alalie», du nom d’une des pièces proposées.
L’alalie, un mutisme soudain où l’esprit se trouve plongé de trop d’évidence. À l’image de l’oeuvre éponyme où les langues rares disparaissent avec les langues communes, l’homme avec les animaux, nous arrivons à un moment où l’expérimentation nous a conduits au silence verbal, nous ne pouvons que laisser les oeuvres parler d’elles-mêmes, «réciter» un monde où l’homme se doit d’abord d’observer.
Ces oeuvres, loin d’être des hypothèses purement scientifiques ou anthropologiques, sont avant tout des objets actifs, des efficaces, qui offrent l’hypothèse que l’art est un des rares vecteurs de l’anticipation. Mais aussi qu’il peut produire des projections à même de «guérir» un état où le monde ne peut plus être appréhendé, tant sa complexité est grande.
Ainsi, toutes ces oeuvres mettent en jeu la confrontation d’éléments perceptibles antinomiques, révélatrice de processus invisibles. Chacune de ces pièces est tirée d’une expérience vécue».
Les spectateurs découvriront progressivement ces pièces, organisées dans les galeries d’exposition comme sur le cheminement d’un parcours initiatique.
À l’entrée de l’exposition, une vitrine de congélation présentera un bloc de glace découpé dans la glace du Spitzberg par les deux artistes qui auront dû emprunter un bateau brise-glace danois pour la réalisation de ce voyage, à la fin du mois d’avril. Ce bloc de glace portera la trace d’une empreinte d’ours polaire. L’ensemble de l’expérience filmée sera diffusé dans une petite salle adjacente.
Dans la première grande salle de l’exposition sera présentée L’Alalie, un grand mural de plus de huit mètres représentant un planisphère où sont figurés les noms d’espèces animales en voie de disparition.
Leur nom est écrit dans des langues elles-mêmes en voie de disparition et dans le centre de l’image un dispositif technique de balayage efface progressivement les données au rythme de celui de la disparition effective de ces espèces.
Et ceci n’est que le début du parcours…