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L’adieu au paysage

Pourquoi un peintre, Claude Monet, né en 1840 et qui, croyait-on, avait fait le tour de la peinture, ayant été le chef de file de l’impressionnisme, a-t-il passé les dernières années de sa vie, au XXe siècle, à habiter son art au point de totalement le
bouleverser ?

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Stéphane Lambert
L’adieu au paysage

Pourquoi le vieil artiste, retiré de Paris, a-t-il l’idée de saluer la fin de la Grande Guerre, dont il n’avait pas vu une goutte de sang, par deux panneaux décoratifs offerts à la France ? Pourquoi Giverny, ce lieu qui aurait dû n’être qu’un décor pour peintre paysagiste, allait-il devenir un laboratoire de modernité ? Et pourquoi tout ce qu’il avait peint jusque-là allait-il converger vers les eaux dormantes d’un étang, royaume d’une plante aquatique dont le nom serait désormais associé au génie d’un homme qui, en poussant le réel dans ses derniers retranchements, ouvrait le chemin à l’abstraction ?

Cela n’aurait pu être rien d’autre qu’une obsession de peintre mégalomane. Le couronnement capricieux d’un artiste au faîte de son œuvre et de sa gloire, chef de file d’un mouvement (l’impressionnisme) qui avait marqué l’histoire de l’art. Le vieil homme avait passé la guerre (« la sale guerre ») calfeutré dans son domaine de Giverny, tantôt cultivant son jardin qui était son orgueil, tantôt étalant et mélangeant sur des séries de toiles innombrables des verts et des bleus. D’autres ne connaissaient alors de la nature que la malléabilité de la où creuser des tranchées et des tombes.

Puis, un armistice avait sonné la fin des hostilités. Et pour célébrer la paix (« la Victoire »), le peintre s’était proposé d’offrir à la France deux panneaux dits décoratifs, fruits de son propre combat pour saisir l’âme de la matière.

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