Avec La Valse, Raimund Hoghe poursuit son travail de réinterprétation du répertoire classique. D’Igor Stravinski à Maurice Ravel aujourd’hui, la volonté de relire les œuvres classiques témoigne de la nécessité de donner vie au passé au cœur du présent. Pour Raimund Hoghe, la danse est mémoire de l’histoire.
La Valse de Ravel
Ardent promoteur de la culture russe en France, et alors impresario des Ballets russes, Diaghilev propose à Maurice Ravel de composer un ballet sur un thème particulier, Vienne et ses valseurs. Acceptant la commande de Diaghilev, Ravel décide de reprendre une étude qu’il disait être « un tourbillon fantastique auquel personne ne peut se soustraire ». Au travers de La Valse, Ravel n’entend ni célébrer ce genre de danse ni Vienne, symbole de l’effervescence culturelle de l’avant-guerre, mais décrire le mouvement enivrant et irrésistible de la valse. Aussi la pièce de Ravel offre-t-elle une sorte de spectre de la valse allant de motifs clairs, légers et enjoués à des motifs menaçants, sombres, puis lugubres et stridents. L’harmonie initiale tend à se défaire, exprimant en cela une perte de contrôle, et apparaît une brutalité musicale que donnent à entendre les percussions. Cette désagrégation de la valse signifie pour Ravel la terrible présence de la guerre et sa puissance dévastatrice.
Diaghilev refusera l’étude de Ravel dont la seule version musicale ne sera jouée à Paris, pour la première fois, qu’après la guerre. Ravel en écrira un peu plus tard une version pour deux pianos. En 1928, La Valse deviendra un ballet en un seul acte conçu par la chorégraphe Bronislava Nijinska.
La Valse de Raimund Hoghe
Fidèle à sa démarche consistant à se confronter aux œuvres de la musique et de la danse classiques, Raimund Hoghe a choisi de donner sa propre interprétation de La valse de Ravel, après s’être réapproprié Le Sacre du printemps, Le Lac des cygnes, le Boléro et L’Après-midi d’un faune.
Le travail de Raimund Hoghe est traversé par l’histoire et le besoin du souvenir. Relire les Å“uvres du passé est une nécessité : « Il ne s’agit pas de reconstruire quoi que ce soit mais de retrouver l’esprit d’une oeuvre, de la prolonger en lui donnant une chance d’exister dans la mémoire des gens. Vivre au présent ne suffit pas », a-t-il pu déclarer.
L’idée de cette nouvelle création est née après la collaboration de Hoghe avec le pianiste Guy Vandromme, qui joue précisément sur scène la version pour piano de l’oeuvre de Ravel, appelant ainsi les interprètes à réagir à la musique. Mais La Valse n’est pas la seule musique utilisée puisque d’autres valses, et notamment les valses viennoises qui inspirèrent Ravel, sont intégrées à l’interprétation de Hoghe. Comme à son habitude, Hoghe ne suivra pas une chorégraphie définie à l’avance et laissera place à une certaine forme d’improvisation qu’apprécieront les danseurs avec lesquels il aime travailler, notamment Marion Ballester, Emmanuel Eggermont et Takashi Ueno.