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La Tombe du plongeur

Avec la Zampa, les corps semblent être pris au piège d’une machinerie complexe qui les entraîne à la lisère de l’absurde et de l’étrangeté. Les mouvements contournent les règles de la logique, les danseurs font du sur place, frappent et s’agitent dans le vide, s’unissent en de douces ou violentes retrouvailles dont le sens nous échappe. L’usage de la vidéo, son omniprésence sur scène, abolie la soumission à une temporalité linéaire, dilatant l’espace-temps en une multitude d’ecrans qui proposent une autre lecture des corps, fictionnelle et fragmentée — bouche, yeux.

Ce règne du chaos, en cela qu’aucun ordre, aucun principe ne paraît présider à son avènement, projette en nous une réelle inquiétude, un malaise, nés de notre incapacité à cerner ces phénomènes et de notre position de voyeurs, embarqués dans la violence ou la volupté de l’autre. Avec, pour couronner le tout, la présence étrange du vidéaste sur scène qui bricole les lumières, crée de nouvelles images, intervient comme un scénariste dans le déroulement du spectacle.

Il y a quelque chose du cinéma fantastique et surréaliste dans ces apparitions et disparitions soudaines, ces images décousues, qui s’imposent à nous comme des flashs oniriques en provenance de l’inconscient ou se superposent, s’étirent dans le temps, avec le différé des spectres. Les traces du passé, les souvenirs (et tout ce qu’ils pourraient contenir de violence enfuie, de fantasmes, de velléités d’être) remontent à la surface, glissent sur les peaux dénudées, se figent en des poses photographiques.

Immobile, le corps souffrant devient icône, s’adonne à de pieuses jouissances, stigmates sanguinolents et sourire complaisant. Puis du duo au solo, il libère un mouvement qui semble tirer son énergie de l’eau, du scintillement de la lumière. Un mouvement juste, magnétique, dont la forme fluide et compacte varie aux grès des flux et des ressacs numériques, sursaute ou rebondie comme exposée à des stimulations électriques. Ainsi, violent et violenté, souffrant ou jouissif, libre ou dominé, traversé de court-circuits, déformé par la lumière, le corps s’impose, dans ses réalités contemporaines, en lien avec la machine et les forces vives de la nature.

— Chorégraphie et interprétation : Magali Milian et Romuald Luydlin
— Assistant : Loran Chourrau
— Collaboration artistique : Bruno Geslin
— Création lumière : Pascale Bongiovanni
— Musique : Patrick Codenys + Pansonic + Pixel
— Arrangements et régie son : Valérie Leroux
— Scénographie : La Zampa
— Construction décor : Jacques Masliah
— Réalisation et montage video : Loran Chourrau, avec Sylvain Huc, Romuald Luydlin, Magali Milian
— Moyens techniques : Le Petit Cowboy / La Zampa

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