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La langueur des losanges

22 Oct - 04 Jan 2009

La peinture de Thomas Huber se nourrit autant d’iconographie moderniste que de références à l’histoire de l’art pour interroger avec ironie le quotidien et ses représentations.

Thomas Huber
La langueur des losanges

Né en 1955, Thomas Huber propose depuis 1982 une oeuvre singulière et analytique, conçue comme une sorte de récit de la peinture elle-même, de sa fabrication à sa mise en espace. Nourri de références conceptuelles, Thomas Huber pense en images. D’une facture immédiatement lisible, stylisée, voire légèrement naïve, ses tableaux ne sont pas réalistes pour autant.

Les lieux les plus souvent représentés, salles d’exposition, bibliothèques, archives, l’atelier, tous à vocation culturelle, évoquent les architectures modernistes de Mies Van der Rohe et de Le Corbusier et les plans de couleurs, souvent primaires qui en définissent l’espace.

Absolument contemporains, ses tableaux n’en font pas moins venir à l’esprit des références telles que les tableaux d’architectures des primitifs italiens ou les intérieurs d’églises hollandais du XVIIe siècle qui tous représentent symboliquement la société de leur temps. Thomas Huber sonde avec un regard légèrement ironique et désabusé, le rapport de l’art et de la vie et revisite la question de la profondeur. Mais celle-ci n’apparaît pas seulement comme un moyen technique utilisé pour faire naître l’illusion mais comme une fiction. Le tableau est un lieu, un espace de croisement. Sa face et son revers, perdant leur opacité, marquent la limite entre deux réalités : celle du quotidien et celle de la représentation.
L’histoire qu’il raconte est celle d’une relation parfois réussie, parfois dangereuse où on peut vivre dans les tableaux, où on peut porter les tableaux dans la rue comme dans l’Art Parade de New York. Le passage de l’espace représenté à l’espace de vie est répété : vie de l’artiste et de sa famille dans les premières années de sa carrière, vie des spectateurs.

Absolument transparents tant par leur aspect figuratif que par leurs couleurs pastels, les dispositifs qu’il choisit sont rendus complexes par le jeu des ombres, des reflets, de la lumière qui passe d’un espace à l’autre, une transparence souvent associée à la nature morte dans l’histoire de la peinture. Les tableaux récents de Thomas Huber sont souvent vides de toute présence humaine. Seuls les banquettes, chaises et objets divers introduisent la référence à l’humain. La série des «tableaux théorétiques» rappelle l’importance des constructions géométriques de l’espace dans l’élaboration de la perspective occidentale. Cette relative froideur des tableaux traduit l’attachement de l’artiste à une peinture qui n’est pas une expression personnelle mais une proposition d’ordre sociale.

L’exposition rassemblera un ensemble de 52 huiles sur toile et de 27 aquarelles et carnets datés de 1993 à 2007, présentés autour des thèmes : arrêt sur image, l’exposition, ouvertures, Art parade, tableaux théorétiques. A l’entrée de l’exposition, le visiteur sera accueilli par un tableau de grandes dimensions ; le Kabinett der Bilder, provenant du musée d’Aarau, qui transfère à l’époque contemporaine l’espace du cabinet de curiosités. Dans la première salle du Carré d’art, la mise en abîme des espaces, la présence du tableau dans le tableau, qui est l’un des modes de fonctionnement de ce travail, s’étendra à l’environnement même de la salle d’exposition pour convier le visiteur à une longue promenade dans la peinture.

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