ART | EXPO

La grande parade

16 Oct - 25 Nov 2014
Vernissage le 16 Oct 2014

A l’huile et à l’acrylique sur toile, Florence Obrecht renoue avec la tradition des portraits en pied. Elle les met en scène de manière frontale, dans un décor de fête, de grande parade. Les masques et les déguisements sont ceux des jeunes filles apprêtées, s’inspirant des attitudes des grandes dames des tableaux anciens.

Florence Obrecht
La grande parade

Charlotte, Clara et quelques autres…
Florence Obrecht aime à parer ses modèles, les vêtir et les mettre en scène pour les peindre, renouant avec la tradition des portraits en pied. Car si sa peinture est parade, c’est qu’elle est nécessaire travestissement de la triviale réalité. Les figures sont là face à nous, interdites, dans leur mutisme et leur frontalité.

Regardons Charlotte, cette jeune-fille au regard un peu absent, et au léger sourire, les joues doucement rosies. Peut-être aperçoit-elle non loin de là, hors champ, son amant ou un prétendant. Dans sa robe au modelé de satin rappelant celles du 16ème siècle et des peintures renaissantes, elle attend. A côté d’elle sont ses attributs en un bouquet de chardons bleutés. Symbolise-t-il la fidélité et l’amour conjugal, comme dans le fameux autoportrait de Dürer? Nous ne le saurons pas, mais il faut savoir être attentif aux détails et déceler les subtils anachronismes, à l’instar du piercing que la belle porte à son oreille gauche…

Et puis, Clara, si jeune mais déjà si mûre, le regard cerné, comme surprise par elle-même, presque hébétée. Elle est en même temps d’une sensualité déroutante, la bouche à demi ouverte, les lèvres brillantes, les joues rondes et charnues. Dans ses cheveux sombres, un grand nœud noir en satin à la Manet. Aussi, sa longue robe rose de mousseline légère à la petite cape de fourrure invite à la danse ou peut-être à d’autres rituels… Tout reste énigme, jusqu’au papier peint tout juste esquissé rappelant ceux de William Morris; jusqu’à l’éventail récurrent, fidèle, quant à lui, à celui que Goya mettait dans les mains de ses comtesses fiévreuses.

Sur un air de fête
La fête est-elle finie? La grande parade à laquelle nous sommes conviés — carnavalesque, enjouée et festive; celle des goûters d’anniversaire embellis de boules à facettes et de gâteaux alléchants — cache-t-elle un autre décor, invisible celui-là, qui se révélerait une fois le rideau tombé? Les masques et les déguisements sont ceux des jeunes filles apprêtées, (troublant le jeu en) «s’inspirant des attitudes des grandes dames des tableaux anciens» comme le dit l’artiste, ou encore ceux des enfants maquillés en arlequins et autres petites souris…

L’enfance et la jeunesse sont ces passages éphémères ici propices au glissement de la peinture, et l’on peut se demander ce qui adviendra après la fête, lorsque les corps fatigués disparaîtront dans le désordre des confettis.

Une partition muette et jaunie ayant appartenu au grand-père de l’artiste joue une fugue de Mozart: sur celle-ci, quelques perles rebondies miroitent de leur beauté argentée et tissent un lien avec un passé qui n’est plus, celui des grands bals d’autrefois.

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