En réponse à la demande du directeur du Théâtre de la Ville à Paris, Emmanuel Demarcy-Mota, Angelin Preljocaj crée le ballet La Fresque, qui s’adresse à un jeune public, mais ne se limite pas à celui-ci, si l’on en juge par son intention. Ne déclare-t-il pas qu’« il y a une filiation entre l’enfance, souvent à la source de l’art, et la création. Et j’ai eu envie de redonner à l’enfance une part de mon art comme une offrande » ? Si La Fresque est un spectacle éclairé par l’émerveillement propre à l’enfance, sa création a permis à Angelin Preljocaj de « chercher une nouvelle écriture en allant vers l’épure et la simplicité. »
Un conte traditionnel chinois
La Fresque s’inspire d’un conte chinois du treizième siècle, La peinture sur le mur, faisant le récit des tribulations de deux voyageurs, Chu et Meng, dont nous ne connaissons ni la provenance ni la destination. Surpris par la pluie, les deux hommes se réfugient dans un temple dans lequel ils découvrent une fresque murale représentant un groupe de jeunes femmes dans un bosquet de pins parasols. Fasciné par cette peinture, et plus particulièrement l’une de ces jeunes femmes, Chu n’entend plus le bruit de la pluie battante mais le souffle du vent dans les pins. Le voyageur soudainement transporté dans la fresque ne fait désormais plus qu’un avec celle-ci. L’histoire merveilleuse de ses aventures se déroule alors et s’interrompra lorsqu’il en sortira, laissant derrière lui une jeune femme dont la coiffure a changé car elle porte le chignon des femmes mariées. Seul ce détail, qui trouble l’ordre initial du tableau et fait vaciller la réalité, semble confirmer l’incroyable péripétie de Chu.
La Fresque
Suggéré par le conte médiéval chinois La peinture sur le mur, La Fresque prolonge le travail d’adaptation des contes entrepris par Angelin Preljocaj depuis les années 1990. L’Anoure (1995), Blanche Neige (2008), et Siddharta (2010) ont successivement fait partie de ses choix. La Fresque permet à Angelin Preljocaj de se tourner vers les contes traditionnels d’Asie dont il dit apprécier le sens des détails en apparence anodins ainsi que le caractère burlesque et grotesque. Mais ce spectacle lui donne aussi l’opportunité d’aborder un registre dont il s’est jusqu’alors tenu éloigné, le fantastique.
La chorégraphie d’Angelin Preljocaj transfigure le conte d’origine, donnant vie et mettant en mouvement la scène centrale de l’apparition de la fresque, représentée par un cadre de lumière et cinq danseuses immobiles. Ici, la danse évoque la puissance figurative de la peinture et la confusion de la réalité et de l’imagination.
La scénographie du designer Constance Guisset sert de point d’appui aux mouvements dansés en enveloppant la scène de lumières énigmatiques qui évoquent le tracé d’un pinceau, la mer, un dragon, ou une chevelure. Ce dernier attribut, symbole absolu de la féminité dans La Fresque, a fait l’objet d’une attention particulière. Constance Guisset a en effet filmé des cheveux flottant dans l’eau et retravaillé ces images avant de les projeter sur scène. Tableau après tableau, l’ondulation des cheveux des danseuses accompagne le déroulement de l’histoire, depuis l’entrée dans la peinture murale du principal protagoniste jusqu’au dénouement final.
Précédentes représentations
La Fresque, d’Angelin Preljocaj, à la Comédie de Clermont-Ferrand, du 7 au 9 décembre 2016.