Michael Riedel
Kunste Zur Text (Algorithmiques)
« Kunste zur Text », titre identique à celui de sa rétrospective à la Schirn Kunsthalle de Francfort qui s’est terminée en septembre (Kunste zur Text, catalogue 288 p., couleur), a été choisi par Michael Riedel en référence à la revue d’art Texte zur Kunst. Bien que l’inversion des mots rende l’expression grammaticalement incorrecte en allemand, ce titre s’entend comme «une incitation, une directive exhortant à résoudre un problème ou un ensemble de problèmes» (un algorithme). Le regard porté sur l’art (discours, appréciation, médiation, reproduction) devient ainsi le point de départ d’une nouvelle production artistique. On ne peut donc plus parler d’art («Kunst»), mais d’une forme différenciée («Kunste») qui s’en démarque, ce qui place la critique d’art et ses «exigeantes contributions à l’art contemporain» (Texte zur Kunst) dans une situation devenue autre.
On peut considérer que la pratique artistique de Michael Riedel débute avec la performance de 1997 (lors d’une lecture au Städelschule de Francfort), par laquelle il s’inventait lui-même en artiste, en arborant sur la tête un sac en papier portant son nom. Il représentait ainsi l’artiste à l’intérieur de l’artiste. D’autre part, il réussit, grâce à des reproductions répétées au cours de ces dernières années, à réintroduire le «système de l’art» au cÅ“ur de «l’art en tant que système», déclenchant ainsi une production qui se fait suite à elle-même, et dans laquelle il peut puiser à foison.
Certains éléments de la rétrospective sont repris dans l’exposition, comme le poster Kunste zur Text, une impression du site internet http://www.artipool.de/ausstellungmuseum.cfm?museumsID=1302 dont Michael Riedel a tapissé les murs de la galerie, et qui servait de toile de fond à la présentation de certains groupes d’Å“uvres à la Schirn Kunsthalle. Ici, par contraste, il renonce aux Å“uvres se distinguant de l’arrière-plan, pour au contraire le mettre en valeur à l’aide de cinq images sérigraphiées (252 x 142 cm) qui reprennent le motif du poster.
Cette exposition est traitée par Michael Riedel comme une véritable publicité pour ses Å“uvres, que l’on peut résumer à l’aide du concept « Kunste zur Text » (arts sur le texte). La non présence des Å“uvres dans l’exposition est suppléée par des informations portant justement sur ce fait, et qui peuvent à leur tour être elles-mêmes considérées comme des Å“uvres.
L’information et la communication autour des activités artistiques constituent la matière de Michael Riedel, matière qu’il reconvertit artistiquement selon son «click-esthétique». Le magazine Frieze le décrit comme un «dandy numérique», et il n’est pas rare de lire que «la comparaison avec Warhol est inévitable» (The New York Times). La production considérable de posters de Michael Riedel est une réponse esthétique aux nouveaux moyens de communication et aux technologies qui y sont liées. Si l’on replace dans les années 1990 l’avènement d’Internet comme outil employé à des fins personnelles, Michael Riedel est l’un des premiers artistes de cette génération. Les textes de ses posters sont divers: transcriptions de prises de son restituant d’innombrables conversations, textes classés par ordre alphabétique, impressions de sites internet, utilisation de programmes de reconnaissance vocale, de lorem ipsum (Zéro Deux), de modes d’emploi, ou même de listes d’Å“uvres réalisées ou non réalisées, qui réactualisent l’écriture automatique d’André Breton et de Philippe Soupault.
L’exposition montre également une sélection de posters réalisés entre 2005 et 2012.