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Julie-C. Fortier. There’s No Place Like Home

Vidéos burlesques de mises en scène sans but ni conclusion (l’artiste accrochée à une patère et appelant à l’aide, creusant un trou, transportant un rocher factice sur le toit d’une voiture, etc.), si ce n’est montrer l’action elle-même, en un pur geste. Devant ces situations sans explication ni contexte, on passe de l’attente au doute puis à la stupeur.

— Auteur : Jacinto Lageira
— Éditeur : La Box, Bourges
— Année : 2005
— Format : 10 x 14,50 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : non paginé
— Langues : français, anglais
— ISBN : 2-910164-33-0
— Prix : 18 €

Présentation
par Maria Wutz

Une maison qui s’envole, un enfant sous une boîte en carton, un ciel qui défile derrière la porte. Autant d’images qui se seraient matérialisées en glissant hors du film comme un personnage de Tex Avery franchissant à l’écran la bordure perforée de la pellicule dans l’élan d’une fuite effrénée. Autant d’objets hybrides, mi-décors mi-sculptures, qui attendent dans l’espace d’exposition une chute narrative qui n’arrive jamais. Julie-C. Fortier aime évoquer le souvenir de ses jeux d’enfance lorsque ses frères expérimentaient avec elle quelque cascade remarquée dans un cartoon vu à la télévision.

Elle a souvent fait la preuve qu’il ne vous arrive rien lorsqu’un rocher inventé vous écrase de son poids fictif ou lorsque la mèche d’une bombe imaginaire vous passe entre les deux oreilles. De là sans doute son goût pour les désastres préparés et pour les dérapages contrôlés. Chez Keaton, qu’elle a beaucoup regardé, comme la plupart des burlesques du cinéma muet, le tragique n’est jamais très loin du comique. Dans l’installation There’s No Place Like Home l’humour convoque aussi l’angoisse. La cascade jouée en boucle devient vite terrifiante plutôt que récréative. Faute de se résoudre dans le gag, le récit suspendu installe une forme de gravité inédite. Avec cette exposition à La Box Julie-C. Fortier marque une nouvelle étape dans son travail. Ce qu’elle recherchait dans ses performances et ses vidéos à travers une exploration méthodique des limites de la retenue et de la pose se trouve ici incarné dans des objets qui convoquent un scénario énigmatique. L’anecdote qui aurait pu expliquer l’avant, ou annoncer l’après, garde le mystère d’une aventure secrète. Julie-C. Fortier parle de disque rayé ou d’image gelée (frozen frame) pour décrire ce qui se trame quand l’exposition semble dans le suspens d’une explosion. Et sans doute sommes-nous aujourd’hui dans cette attente.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions de La Box — Tous droits réservés)

L’artiste
Julie-C. Fortier est née en 1973 à Sherbrooke, Québec, Canada. Elle vit et travaille en France depuis 2001. Voir son site

L’auteur
Jacinto Lageira, critique d’art, enseigne l’histoire de l’art et l’esthétique à l’école des beaux-arts du Mans, ainsi qu’à l’université de Paris I-Panthéon Sorbonne.

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