John Tremblay
John Tremblay
La musique, l’architecture, l’urbanisme. La peinture de John Tremblay, né en 1966, puise à l’impalpable et, tout autant, a besoin du concret pour questionner ce qui fait tension dans la peinture. De cette double nécessité ont jailli des toiles abstraites, mais toujours néanmoins travaillées par l’idée du réel. Par la préoccupation aiguë du réel. Le réalisme abstrait pratiqué par John Tremblay est sous-tendu par les virtuosités vertigineuses de l’abstraction en s’arrimant d’abord à la réalité. 

«Réalité», le mot, selon Vincent Pécoil, fondateur de la Galerie Triple V et auteur d’une monographie sur John Tremblay, doit s’entendre comme «ce qui se devait d’advenir», soit une réalité où l’art et le réel seraient amenés à se fondre, à dissoudre leurs particularités pour ne former plus qu’un. La quête de l’œuvre du plasticien américain, somme toute, est celle d’utopies à notre portée, ici et dès à présent, à mille lieux de représentations évanescentes et inaccessibles.
Observant les formes de certaines toiles (shaped canvas) de John Tremblay, on est saisi par leur propre dynamique, leur mouvement réel ô combien. Nous interpelle le bougé ferme de Fragment 31, 2015, dentelle géométrique perforée qui semble vouloir fuir sa première esquisse et peut-être son ombre. Ailleurs, sur l’œuvre Operation Freak-Out, sculpture qui conjugue contre-plaqué, aluminium et peinture aérosol, les espaces d’air créés entre le bois s’imposent étrangement avec plus d’évidence que la matière elle-même.
À ses prémices pourtant, le travail de John Tremblay s’est nourri de pratiques et de mouvements artistiques de la deuxième moitié du XXe siècle, au carrefour du Pop art et de l’art optique. L’abstraction est reine alors, en l’espèce de motifs caractéristiques, bulles ovales ou rectangles aux angles adoucis, récurrents sur la toile. En effet, les peintures de John Tremblay surgissent toujours sous le signe de la série et du collectif. La répétition fait alors présence, souligne. Voilà qui créée une scansion, une force d’une toile à l’autre. Voilà qui rythmait, déjà , concrètement, la composition Pop-Op où le réel déjà palpitait et réclamait sa part.