L’exposition de Jim Shaw à la galerie Praz-Delavallade rassemble toiles et dessins et nous plonge dans un univers à la fois cauchemardesque et réaliste. En entrant, on est frappé par l’œuvre intitulée Left Behind 2# (2005). Elle est composée d’un fond peint représentant une sombre forêt surplombée d’une maison sinistre et d’une toile en tissu posée devant, sur laquelle figure une procession d’individus qui tiennent des pancartes et dont le costume rappelle celui des moines du Moyen Age. Apparences fantomatiques et inquiétantes de ces individus dont seuls les contours sont peints d’un bleu translucide.
Dans la même salle, des toiles représentent des prêtres enveloppés de lignes courbes dessinées à l’aérographe. Une de ces toiles montre un prêtre dont le bras en l’air est encerclé d’une forme circulaire. Cela rappelle les précédents travaux de l’artiste sur l’O-isme : une religion née au milieu du XVIIe siècle dans la région de Lake Finger (Etat de New York), qui prône l’adoration d’une divinité féminine symbolisée par la lettre O et qui, autrefois controversée, est désormais incorporée à la culture américaine.
Jim Shaw critique en filigrane le lien entre cette religion chrétienne fondamentaliste et le pouvoir aux États-Unis qui, plus que jamais, mêle religion et politique. Les dessins montrent, par leur esthétique noire et relativement inquiétante, le danger inhérent au mélange des deux sphères.
Une autre série de dessins Monster Faces and Ads (2005), de dimensions variables, représentent des visages plus ou moins effacés derrière de grandes traces de pinceaux, des bavures de peinture ou encore des trous dans le papier. Ces visages représentés sont comme des lambeaux de portraits, déréalisant la figure humaine en la montrant comme en proie à des troubles intérieurs. Dans la deuxième salle de la galerie, un immense décor sur toile peint à l’acrylique représente une partie d’un stade un peu spécial : Left Behind 3# (2005). On a l’impression de se retrouver dans le stade bondé où sont dessinés vélos, trottinettes, etc. customisés à l’aide de fausses pierres précieuses. Ces moyens de locomotion, appartenant chacun à une époque précise, sont rangés chacun devant une tombe, calés entre les fesses des morts dépassant de la terre. Les tombes sont celles, par exemple, d’Henri Kissinger, ancien chef de la diplomatie américaine. Left Behind 3# semble ainsi symboliser les attentes déçues et la désillusion par rapport à la politique américaine.
D’autres oeuvres, issues de l’imagerie américaine, représentent le père Noël (Santa Claus) et Bugs Bunny souriant de manière menaçante et montrant ainsi les contradiction d’une culture supposée de rêve, mais où le cauchemar n’est jamais loin.
Enfin, dans quelques dessins de la série des Dream Object des hommes nus se transforment en souris géantes aux dents carnassières.
Jim Shaw :
— Left Behind #3, 2005. Décor sur toile, acrylique. 320 x 730 cm.
— Left Behind #2, 2005. Décor sur toile, acrylique sur tissu. 320 x 700 cm.
— Sans titre, 2005. Crayon et aérographe sur papier. 198,5 x 130 cm.
— Sans titre, 2005. Crayon et aérographe sur papier. 201 x 131 cm.
— Dream Object, 2005. Crayon et impression sur papier. 45 x 32 cm
— Distoreted Faces and Ads, 2005. Encre et acrylique sur papier. Dimensions variables.
— Monster Faces and Ads, 2005. Encre et acrylique sur papier. Dimensions variables.
— Dream Object, 2005. Encre sur papier. 30 x 22 cm.
— Sans titre (Ripped up face Painting), 2005. Huile sur toile. 184 x 122 cm.
— Sans titre (Ripped up face Painting), 2005. Huile sur toile. 164 x 122 cm.
— Sans titre (Ripped up face painting), 2005. Huile sur toile. 153 x 97,5 cm.
— Dream Object, 2004. Crayon sur papier. 35,5 x 28 cm.
— Dream Object, 2004. Crayon et encre sur papier. 35,5 x 28 cm.
— Dream Drawing, 1996. Crayon sur papier. 30 x 23 cm.