Sur scène, ça vole et ça vibre. Sans décor, dans une semi-pénombre, des surfaces blanches réfléchissent la lumière. Balles, cordes, feuilles de polystyrène… Comme des lucioles, les éléments virevoltent. Avec Magnétic, le chorégraphe et jongleur Jérôme Thomas signe ainsi une pièce poétique, pour quatre jongleuses, sur une musique du compositeur Wilfried Wendling. Spectacle en trois tableaux, la féérie de Magnétic tient à la simplicité des dispositifs, à la dextérité des interprètes. L’ambient électro-minimale (glitch) du compositeur Wilfried Wendling, pulsatile et distillée, accompagne le mouvement hypnotique des balles. Dans l’obscurité de la scène, les éléments semblent osciller, vibrer comme autant d’électrons en tension. Et transformant la scène en champ de force, par le jonglage, la musique, la lumière, les tiges et les élastiques, Jérôme Thomas livre une pièce qui capture les regards, les enveloppe. Pour une expérience sensorielle unique, aux confins de l’agitation moléculaire.
Magnétic de Jérôme Thomas : le jonglage, entre apesanteur, champ de force et poésie
À la base de Magnétic, il y a l’aventure de Hic, entamée par Jérôme Thomas en 1995. Première partie du spectacle Hic Hoc, Hic mobilisait alors quatre jongleurs (Phia Ménard, Martin Schwietzke, Mads Rosenbeck, Emmanuel Anglaret ou Vincent Lorimy). Hic a parcouru le monde et le temps, pour donner naissance à Magnétic. Aujourd’hui interprété par Audrey Decaillon, Chloé Mazet, Nicoletta Battaglia, Gaëlle Cathelineau ou Ria Rehfuss, Magnétic déploie trois tableaux, en crescendo hypnotique. Le premier volet joue sur l’apparition. Les jongleuses entrent et sortent de la lumière. Les visages, les mains, les balles blanches composent un environnement de présences en pointillés, sous l’égide de la gravité. Puis les tiges de kevlar s’invitent. Montées sur de longues structures souples, comme des roseaux, les balles semblent alors flotter. S’échapper de la pesanteur pour entrer dans un autre champ de force. Prémices au deuxième tableau, qui s’ouvre avec de grands élastiques blancs.
La magie de la matière et des interactions : une chorégraphie hypnotique
Cordes vibrantes, les élastiques dessinent alors des axes géométriques. Un maillage souple qui ne cesse de varier. Les jeux de lumières et vitesses (avec la persistance rétinienne) font naître un espace cinétique où la perception complète la scénographie. Dans le regard des spectateurs se compose ainsi un univers surréel. Et le troisième tableau, complètement inédit, incorpore des feuilles de polystyrène, petites et grandes. L’électricité statique devient alors élément de jonglage pour une réinvention de la suspension. Jouant sur les lois physiques, Magnétic dépasse la magie pour plonger dans la matière des interactions. Le jonglage de Jérôme Thomas entraine dans un voyage qui prend la clef des champs. Dans une texture sonore où les clicks, cuts et glitches ouvrent les infinis de l’imagination. Pour un spectacle en forme, tour à tour, de plongée moléculaire, de nuit d’été en compagnie des lucioles, ou de rêverie côtoyant les corps célestes.