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Jérôme Boutterin

PSébastien Delot
@12 Jan 2008

Sur la toile, des grilles constituent une structure plane abstraite dans les mailles de laquelle Boutterin réintroduit peu à peu le motif, la figuration. Volonté de créer un dialogue inédit entre abstraction et figuration.

La peinture de Jérôme Boutterin se situe à la frontière de l’abstraction et de la figuration. Les vibrations colorées sur la toile se fondent, s’enchaînent pour former la trame d’un univers abstrait, tandis que le dessin émerge peu à peu en surimpression des surfaces colorées.

Les grilles colorées et tachées, constituées de barres verticales et horizontales entrelacées, font du « quadrillage all over » la matrice des recherches de Jérôme Boutterin.
Ces grilles constituent des pièges posés pour capturer des formes abstraites, des « surfaces colorées bouillonnantes » prises dans les mailles d’une structure plane. Peu à peu Boutterin réintroduit le motif, la figuration s’immisce à nouveau dans son travail comme une sorte de topographie informelle, que l’on survole du regard, suivant des crayonnages comme des pistes qui ne mènent nulle part.

Jérôme Boutterin doute de la capacité de la peinture à traiter du réel, il insiste sur le fait que les types, archétypes et idées sont mal compris. Il exprime ainsi la confusion,les erreurs de perception :
« Je pense que les choses ont mal tourné. Il y a un récit, des récits d’origine qui ne vont pas. En tout cas, je suis convaincu qu’il y a quelque chose qui cloche, sans tout ça tout irait mieux. Ce n’était pas une sieste, c’était une mort et ce n’était pas le petit matin, c’était le crépuscule. J’aurais dû le comprendre, mais pour le comprendre il faut le peindre — je le fais. Il y a donc, dans le récit du début, une odeur de fin ».

Comment figer le réel, ou plutôt la perception du réel, en peinture? L’illusion est au cœur du travail du peintre dont l’histoire remonte à Zeuxis. Jérôme Boutterin souhaite nous surprendre, ses dernières œuvres présentées à la galerie Jordan traduisent ses recherches menées pour lier l’abstraction à la figuration et créer de nouvelles passerelles.

Ces toiles sont une transposition de la violence de la réalité dans un romantisme fiévreux et décalé qui resurgit au travers de fonds psychédéliques dans lesquels se morfondent des personnages transparents, grotesques, qui ne disposent que d’une ligne pour signifier leur présence, leur trace.
Ces traits au pastel se fondent dans la peinture en s’y liant, le dessin fait corps et s’incarne dans la couleur.

Jérôme Boutterin peint ses tableaux en composant savamment les glacis de couleurs, laissant des espaces plus clairs afin de créer un effet de « coup de projecteur » sur la toile. Le dessin est appliqué dans un second temps, projeté, ajusté et retouché pour se fondre sans s’imposer de façon agressive, mais pour constituer l’architecture de cette toile.

Des formes, des arbres, des corps, des membres constituent un paysage dont le classicisme passe de façon insolente de Fragonard à Franquin… Comme des dessins animés, les personnages traversent ces univers aux accents d’Arcadie où l’inquiétude et la joie sont indissociables.
Ces métamorphoses témoignent de la volonté de balayer les antagonismes réducteurs et de créer un dialogue inédit entre abstraction et figuration.

Jérôme Boutterin :
— K.02, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 97 x 162 cm.
— K.07, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 46 x 38 cm.
— K.08, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 50 x 40 cm.
— K.12, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 114 x 195 cm.
— K.16, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 195 x 130 cm.
— K.21, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 100 x 73 cm.
— K.23, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 162 x 130 cm.
— K.14, décembre 2003. Huile et pastel sur toile. 195 x 130 cm.
— K.06, janvier 2004. Huile et pastel sur toile. 46 x 38 cm.

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