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Jean-Pierre Pincemin

Le parcours libre de cette exposition permet de suivre le tracé hors des sentiers battus de Jean-Pierre Pincemin. Elle tisse des liens entre les œuvres, dessine de grandes lignes et débusque les récurrences d’où émergent similitudes et correspondances, évolutions et clins d’œil. Avec pour seul guide le plaisir de la peinture.

Né en 1944, Jean-Pierre Pincemin a d’abord été tourneur, tout en s’intéressant au jazz, à l’art moderne et aux avant-gardes. Sa rencontre avec le galeriste Jean Fournier déterminera sa carrière d’artiste, qui débute par un chemin original entre bricolage et production artistique. Dès les débuts, l’univers plastique de Jean-Pierre Pincemin est fait de matériaux récupérés, de rebuts divers et d’expérimentations incessantes. Son travail passe librement de l’abstraction à la figuration dans un jeu de course-poursuite avec les étiquettes.

Des toiles libres, sans châssis accueillent le spectateur. Les Carrés collés datent du début des années 1970 et rappellent le mouvement Supports-Surfaces. Grands assemblages de toiles découpées, trempées dans la teinture puis collées selon un schéma préétabli, elles semblent de bric et de broc. Des motifs géométriques et chatoyants recouvrent la toile suivant une grille orthonormée. La création devient expérimentation à tous les niveaux: les matériaux du support sont ceux de la vie quotidienne, draps ou toiles cirées récupérées, la peinture est de l’huile de voiture ou du liquide médical.
Les Palissades ont une surface plus dense, saturée de matière picturale. Elles sont retravaillées à la brosse et les teintes se mélangent ensuite, indépendantes.

Dans une section de l’exposition six toiles se regardent. Trois toiles libres de la première période proches de la technique des Carrés collés répondent et dialoguent avec trois toiles labyrinthiques de 2005. Malgré la différence d’âge, elles se font écho dans une joie de la peinture et dans la seconde vie accordée aux matériaux récupérés.
La trame géométrique des premières toiles se morcèle dans les plus récentes, la peinture se libère dans un tissage d’arabesques. Archéologique, la surface fouille secrètement les matériaux. Elle est grattée, enfouie, cuisinée, déchirée, creusée, sédimentée, raclée. C’est l’artisanat d’une matière-peinture autonome et grouillante, qui donne vie aux tableaux.

Plus loin, les Carrés collés de 1969, aux motifs de cercles obtenus avec des couvercles divers sont mis en regard avec les œuvres de 2003 où la toile est recouverte de ballons colorés et joyeux, cercles également, ronds et truculents. Un dialogue s’instaure dans l’œuvre tissée de liens avec la récurrence de ces motifs géométriques.

Des toiles figuratives parsèment ce labyrinthe fait de croisements, mises en regards et reprises. Chasse au tigre est une œuvre pointilliste, un fouillis qui fait apparaître les détails à mesure que l’on s’en éloigne. La surface dense rappelle les dernières œuvres abstraites où la toile est le support de plusieurs couches de matières. Manteau chinois est un tableau vivant qui fourmille de réseaux labyrinthiques et dévoile la forme d’un habit d’Extrême-Orient.

Une dizaine de sculptures cadence également le parcours. Un assemblage de matériaux récupérés, cousus et suturés dans un patchwork harmonieux. Comme pour les peintures, les sculptures prennent vie, indépendantes. Elles se lisent dans la profondeur des strates de la matière.

Enfin, un musée de poche ponctue cette exposition, il dévoile un aspect secret de l’œuvre de Jean-Pierre Pincemin. On y retrouve ses œuvres miniaturées, réduites à des échelles de poupée, sorte de visite privée dans l’ensemble de son œuvre.
Ce cabinet de miniatures souligne ce que cette exposition a fait ressortir du dialogue entre les deux périodes extrêmes des œuvres de l’artistes : la liberté d’esprit et le plaisir de peindre.

— Jean-Pierre Pincemin, Sans Titre (Carrés collés), 1970. Acrylique sur toile libre découpées, assemblée et collée. 269 x 191 cm.
— Jean-Pierre Pincemin, Sans Titre (Ballons), 2003. Technique mixte sur toile. 220 x 200 cm.
— Jean-Pierre Pincemin, Sans Titre (Palissade), 1974. Acrylique sur toile libre découpée, assemblée et colée. 317 x 293 cm.
— Jean-Pierre Pincemin, Sans Titre (Chasse au tigre), 2002. Technique mixte sur toile. 280 x 260 cm.
— Jean-Pierre Pincemin, Sans Titre (Manteau chinois), 2001. Technique mixte sur papier marouflé sur toile. 187 x 188 cm.

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