L’univers artistique du design contemporain se distribue entre (au moins) deux grands pôles. D’un côté la recherche et les technologies, y compris de l’information ; de l’autre l’artisanat et le prolongement de savoir-faire ancestraux. Les mettre en compétition n’a pas beaucoup de sens : de leur cohabitation naissent des passerelles fécondes. IBU Gallery, à Paris, se concentre ainsi sur la promotion du bronze et de la joaillerie contemporaine. Entre sculpture et design, la galerie présente l’exposition monographique « Bronze – Objets et meubles d’art » de Jean Grisoni. Sièges, lampes, miroirs, vases, tables, tabourets, service à café… « Bronze » réunit une vingtaine d’œuvres. Dans une alternance de pièces, précieuses, oscillant entre facture classique et accents plus atypiques. Pour une poésie un peu brute.
Exposition « Bronze » de Jean Grisoni (IBU Gallery) : objets et meubles d’art
Longtemps joailler, Jean Grisoni s’est laissé tenter par le changement, y compris d’échelle, en développant des pièces de mobilier contemporain. Mais en gardant la notion d’unique, ou de série très limitée. Son matériau d’élection, le bronze, ne cesse d’accompagner l’histoire humaine. Alliage métallique (cuivre et étain), il aura incarné une acquisition de puissance, par la maîtrise du feu. Produit de masse pendant plusieurs siècles, l’industrialisation et l’emploi du fer l’ont finalement marginalisé. Lui redonnant ainsi une patine de noblesse. Jouant sur cette dualité, les pièces de Jean Grisoni marient bronze, marbre, argent, or, porcelaine… Matériaux auxquels il confère des formes simples, parfois même brutes. Telles les chaises Murtoli et Nebbio, composées de tiges, comme autant de filins rectilignes générant un mesh, un treillis, sans le confort rassurant d’une assise ou d’un dossier moelleux. Chaises graphiques, Murtoli et Nebbio ont presque quelque chose d’arachnéen, façon Louise Bourgeois.
Jean Grisoni : de la joaillerie au mobilier d’art, une poésie un peu brute
Dans un autre registre, « Bronze » expose également Castifao. Une paire de tabourets composés d’une large bande de bronze, pliée. Détail intriguant (et signature de Jean Grisoni), quelques agrafes d’argent ponctuent les fentes ouvertes dans le métal. Entre sutures et corsets nonchalamment lacés-délacés. Si la joaillerie est réputée habiller le corps des femmes, le mobilier de Jean Grisoni n’est pas sans quelque résonance avec cette approche sensuelle et tactile. Autre meuble d’art, aux allures plus monolithiques, la grande table de salon Salvi. Une table qui allie quatre pieds de bronze patiné à un large plateau en labradorite — roche sombre, veinée de reflets métalliques. Jouant sur la lumière en alternant finis polis et bruts, le mobilier de Jean Grisoni fonctionne ainsi comme un bijou, unique, dans l’habitat contemporain. Autant d’objets et meubles d’art à découvrir dans l’exposition « Bronze ».