Communiqué de presse
Bruce Clarke
Je vous écris du jardin de la mémoire
Des draps de tissu blanc tombent en bannières. Légères et translucides, elles vacillent enfermant en leurs plis la mémoire du Rwanda martyrisé. Sur ces linceuls de l’histoire, les silhouettes noires et solitaires d’Africains. Fragiles, mais debout, encore elles semblent attendre que notre regard les croise, sérigraphies du monde impitoyable et cruel.
Des ampoules électriques viennent répandre dans le silence leur toute dernière lueur orangée.
Peut-être est-ce l’écho de lumière venant de Guernica, éclairant le tombeau de l’horreur répétée, ou celle de notre conscience pas tout à fait éteinte.
Au sol des vêtements épars, pauvres et usés, empreintes de vies passées, abandonnés sur les cailloux de notre indifférence comme les mues de vies inachevées.
Une voix monocorde témoigne de ce qui fut, une voix chaude, humaine pour nous dire le froid glacial de l’horreur.
Un carrousel projetant des diapositives tourne inlassablement, horloge d’images où alternent des paysages luxuriants de l’Afrique, des crânes et des tibias empilés, des regards d’enfants, des cadavres découverts dans le lit d’un charnier.
Les lampes de faible intensité nous guident pas à pas dans le noir de ces aubes sans cesse renouvelées. Il faut rester debout, garder les yeux ouverts, et faire ce chemin-là pour conserver l’espoir.