Yves Chaudouët
Je remonte
Le travail d’Yves Chaudouët se caractérise par l’extrême liberté des moyens qu’il utilise pour faire surgir dans l’espace des images inoubliables.
Que ce soit par l’écriture, la gravure, la photographie, il parvient à créer des univers singuliers aux ramifications hétérogènes puisant leurs sources aussi bien chez Herman Melville, Stéphane Mallarmé, John Cage que Paul Bley, pianiste aérien.
Dans ce vaste rhizome poétique, les figures sont suspendues, les paysages flottants, les architectures vrillées. Chacune d’entre elles semblent traverser le temps, défier l’espace. S’agirait-il de mondes entre deux eaux ?
C’est ce que pourrait suggérer l’exposition au titre énigmatique «Je remonte». Constituée de plusieurs ensembles en verre et cristal, elle offre au regard l’étrange population d’animaux sous-marins, habités d’infinitésimales pulsations électroniques, vivant dans le silence et l’opacité des profondeurs.
Anguilles, méduses, étoiles de mer, simplement posées au sol, accrochées dans l’espace, elles transforment les lieux en une sorte d’aquarium gigantesque incitant au calme, tant la menace de leur fragilité est perceptible. Aux limites du visible, ces sculptures recréent un univers parfois inquiétant, souvent étonnant, qui attire comme il repousse.
Présentées pour la première fois au Centre international d’art verrier de Meisenthal en Lorraine – formidable lieu de production de cristal ayant fermé il y a 15 ans et qui, depuis, a retrouvé toute sa vitalité par l’art et le design – ces sculptures avaient transformé l’ancienne usine en une épave sous-marine échouée au fond des sables.
Leur présentation dans le décor historique et enchanteur du château d’Oiron sera l’occasion de les admirer sous un autre angle: celui proposé par les objets merveilleux, tels qu’en possédaient les cabinets de la Renaissance autrefois, et comme, sans doute celui constitué par Claude Gouffier à Oiron au XVIe siècle.
Le château d’Oiron présente déjà des animaux bizarres. Entre le Pégase-Licorne de Thomas Grünfeld ou les Alebrijes de la famille Linares, le peuple des abysses d’Yves Chaudouët révélera l’outre-monde des profondeurs. Loin de toute spectacularité gratuite, dans leur élégance et leur raffinement, ces oeuvres témoignent de la capacité de l’art à exciter l’imaginaire et inviter à la rêverie.