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Jacques Doucet, le Cobra français

09 Oct - 05 Mar 2011
Vernissage le 09 Oct 2010

Jacques Doucet est l'une des figures du groupe Cobra, formé en 1948, lequel entend se détacher du passé, que ce soit l’abstraction ou le surréalisme. Il se dresse contre toute forme de palabre théorique, clamant la nécessité de l’esprit expérimental.

Communiqué de presse
Jacques Doucet
Jacques Doucet, le Cobra français

Marqué depuis sa plus tendre enfance par une histoire familiale douloureuse, Jacques Doucet, naturellement révolté et volontiers insolent exprime, dès ses premières oeuvres créées durant l’Occupation, son désir de liberté.

À vingt ans, après avoir voulu être poète, il choisit de devenir peintre. Il retient pour modèles des artistes novateurs tels Henri Matisse, dont il reprend l’usage des couleurs saturées dans La Table rouge (1945), ou encore Paul Klee et Joan Miró, alors connus d’un seul petit cercle de galeristes et d’amateurs d’art, qui le séduisent par la liberté de leurs dessins.

Dès 1947, ses oeuvres s’avèrent prémonitoires et annonciatrices de ce que sera le groupe CoBrA. Jacques Doucet invente spontanément une forme de figuration ironique et étrange, associe des matériaux insolites tels le goudron, le papier et le carton déchirés, et mêle, sans égard pour les règles établies, les techniques les plus diverses comme cela apparaît dans l’oeuvre Lapidation. Cette même année, à l’occasion de sa première exposition à Budapest, il rencontre Corneille et découvre le
surréalisme hongrois.

De retour à Paris, il adhère au Groupe surréaliste révolutionnaire puis rejoint Corneille à Amsterdam où il fait la connaissance de Karel Appel. Il réalise, à leur invitation, les Équilibristes pour la couverture du dernier numéro de la revue hollandaise «Reflex». En avril 1948, les surréalistes révolutionnaires français organisent à Paris une conférence qui rassemble également des surréalistes belges et le Groupe expérimental hollandais. Leurs débats mènent cependant à une impasse.

C’est dans ce climat que naît, le 8 novembre 1948, l’Internationale des artistes expérimentaux, dénommée «CoBrA». Elle se fixe comme objectif de s’opposer à la sclérose, la mesure, la raison, la paralysie et l’académisme de l’art. Durant les trois années de vie de CoBrA, Jacques Doucet est le seul Français à participer à toutes les manifestations du groupe. Il y trouve un cercle d’artistes qui, comme lui, placent l’expérimentation au coeur de leur démarche.

Comme eux, il cherche à retrouver la spontanéité de l’enfance perceptible dans les oeuvres Jongleur (1949), première oeuvre de Jacques Doucet à rejoindre des collections muséales au Stedelijk Museum d’Amsterdam en 1949, Hommage à Amstrong (1950) ou Tauromachie (1953). Cependant, tandis que Karel Appel, Corneille et Pierre Alechinsky installés à Paris en 1950 oeuvrent de concert, Jacques Doucet continue à travailler en solitaire. Il collabore néanmoins avec son épouse, Andrée, céramiste, à la réalisation de Jeux d’enfants, série composée de plusieurs assiettes et d’un plat, qui témoigne de sa curiosité pour des techniques multiples.

Pour Jacques Doucet, la liberté d’expression est une valeur fondamentale, ce qui l’amène à se détacher, peu après la fin du groupe CoBrA en 1951, de la dichotomie figuration/abstraction. Comme la plupart des artistes du groupe CoBrA, il considère en effet qu’«il n’y a pas une peinture figurative et une peinture abstraite, il y a la peinture, où chacun, à chaque époque est contraint à la redoutable liberté de choisir ses propres signes… La mission de la peinture n’a jamais été de rassurer.»

Dès 1953-1954, il réalise des peintures dont les formes n’évoquent plus de manière évidente la réalité. Une figure apparaît, avec sa structure et sa matérialité, mais la représentation n’est plus nécessaire: la peinture a pour sujet la peinture. Le recours au titre est devenu inutile. Dans le même temps, les formes créées, au départ centrales et très structurées, posées devant ce qui apparaît comme un fond, prennent peu à peu de l’ampleur; la composition, qui opposait au milieu des années 1950 la forme principale à l’arrière plan, devient plus unitaire et gagne en cohérence.

Parallèlement, l’oeuvre de Jacques Doucet évolue vers des touches de plus en plus larges, des gestes plus amples et ronds et des couleurs de plus en plus contrastées, travaillées en profondeur, avec mille nuances délicates. Si l’artiste peint assez brutalement au couteau dans une matière onctueuse et vibrante, il reste néanmoins attaché aux petits formats, par un souci de perfectionnisme et de rapport intime à la toile. Il racle, griffe, restructure, transforme, efface et recommence, travaille journellement, déconstruit et retouche sans cesse ses peintures.

Parallèlement, il réalise des gouaches et quelques collages très libres. Dans quelques oeuvres qu’il appelle tableaux-collages, une partie de la surface est peinte tandis que le reste de la toile est recouvert de sable ou de papier déchiré. D’autres collages associent des lambeaux de dessins à l’encre de Chine ou à la gouache, déchirés par l’artiste. La peinture s’introduit dans le collage comme le collage dans la peinture. Au travers des oeuvres sans titre de cette période, Jacques Doucet exprime avec force des sentiments intérieurs face à la réalité quotidienne du monde.

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