Oscar Tuazon, Eli Hansen
It was one of my best comes
Une des collaborations les plus remarquables d’Oscar Tuazon a eu lieu au Musée de Seattle en 2008. Invité à investir une salle du musée, il a choisi de baser son intervention à trois milles kilomètres de là , sur l’île de Kodiak en Alaska.
Il y créa un habitat précaire, fait de matériaux recyclés et d’éléments naturels trouvés sur place. Au musée, il installa des fragments de cette architecture, comme autant d’évocations d’un ailleurs où se manifesterait son désir d’émancipation et où, libéré de toutes contraintes sociales, il réinventerait leur quotidien dans un geste utopique et jubilatoire.
Ce projet offre un réel condensé des préoccupations d’Oscar Tuazon: sa fascination pour la pratique du DIY (Do It Yourself), son intérêt pour détourner les matériaux et les lieux de leur fonction première, son investissement physique, quasi performatif dans la réalisation de ses sculptures, et au-delà , la façon dont son projet artistique se fonde et se nourrit d’un projet de vie.
Il n’est guère aisé d’évoquer bien en amont un projet d’exposition d’Oscar Tuazon. La mise en tension et en danger qu’il opère dans ses pièces, dans une confrontation de matériaux à la limite de l’effondrement ou de la cassure, est intégrée dans le processus même de constitution de l’oeuvre.
L’artiste ne pense pas en amont le projet d’exposition dans ses moindres détails, il s’imprègne de l’esprit des lieux puis revient quelques jours avant son ouverture pour une réalisation sur place, effectuée dans un engagement physique intense.
Tentons néanmoins l’exercice d’une mise en bouche de son exposition au Parc Saint Léger: le titre de l’exposition « It was one of my best comes » (C’était un de mes meilleurs coups) est extrait d’un poème de Cedar Cigo, jeune poète de la scène alternative américaine avec laquelle Oscar Tuazon entretient des liens étroits et féconds. Dans l’espace central, les deux artistes installent deux arbres arrachés à la forêt et présentés contraints, sanglés et renversés.
L’enjeu sera de capter le matériau dans cet état intermédiaire, quand il n’est plus à l’état brut et pas encore un produit fini. L’arbre coupé, arraché, répond à cet état sans fonction, plus tout à fait un arbre et pas encore une table ou une chaise. Un objet en attente, un peu absurde, créant un moment de tension lyrique et en suspens qui, dans le même temps, devient un élément structurant de l’architecture.