Dans la foulée de son dixième anniversaire, la São Paulo Dance Company vient pour la première fois à Paris. Et ce, avec un triple programme aussi éclectique que dynamique. Ballet contemporain, la São Paulo Dance Company a été fondée en 2008 par le gouvernement de l’État de São Paulo. Et c’est sous la direction artistique d’Inês Bogéa que la São Paulo Companhia de Dança (SPCD) présentera trois pièces de son vaste répertoire. À savoir Suite pour deux pianos (1987) du chorégraphe allemand Uwe Scholz, L’Oiseau de feu (2010) du chorégraphe allemand Marco Goecke et Odisseia (2018), une pièce spécialement créée pour la São Paulo Dance Company par la chorégraphe française Joëlle Bouvier. Triptyque tout en célérité, sensualité et énergie, les trois pièces composent une résonance où s’entrechoquent mémoire collective et fluidité. Dans un parcours qui remonte le temps à pas chassés, de 1987 à 2018 ; de 2019 à Homère.
Scholz, Goecke, Bouvier : première venue de la São Paulo Dance Company à Paris
Pièce pour neuf danseurs (solistes et corps de ballet), la Suite pour deux pianos d’Uwe Scholz s’appuie sur la musique éponyme de Sergueï Rachmaninov, Suite pour deux pianos no 2, op. 17 (1901). Hommage au peintre Wassily Kandinsky, la Suite pour deux pianos d’Uwe Scholz se déploie au milieu de quatre toiles projetées. Souvent présenté comme le père de l’abstraction, avec un tournant en 1908, à travers Wassily Kandinsky la peinture s’émancipe de toute ressemblance figurative. L’image aborde un autre régime d’autonomie. Distinct de la photographie et davantage axé sur sa propre réalité. À l’heure où l’Europe célèbre le centième anniversaire du Bauhaus, en matière d’art graphique Wassily Kandinsky reste l’une des figures-clés de cette école. Lui qui, dans ses différents écrits sur la couleur et la peinture, aura fait de l’artiste l’ultime sommet de sa pyramide des valeurs.
Un triple programme dirigé par Inês Bogéa : des pièces d’Uwe Scholz, Marco Goecke…
Chorégraphe attaché aux structures, c’est par la danse qu’Uwe Scholz aura ainsi exploré la spiritualité de Wassily Kandinsky. À cet opus rigoureux et précis fait suite un pas de deux. Soit L’Oiseau de feu (2010) du chorégraphe allemand Marco Goecke. Une pièce qui célèbre également la mémoire. Celle des cent ans de la création éponyme, L’Oiseau de feu, telle que donnée à l’Opéra de Paris par les Ballets Russes, en 1910, sur une chorégraphie de Michel Fokine. Duo gracile, interprété par Ana Paula Camargo et Nielson de Souza, L’Oiseau de feu de Marco Goecke valorise l’altérité. Avec la rencontre entre « deux créatures de natures différentes : un oiseau dansant et un humain qui vole ». Enfin, création mondiale de Joëlle Bouvier pour la São Paulo Dance Company : Odisseia.
Et une création mondiale de Joëlle Bouvier : Odisseia (2018)
Empruntant son nom au poème d’Homère, relatant les aventures du héros grec Odysseus (Ulysse), la pièce de Joëlle Bouvier plonge dans l’actuel. Quid du voyage, de l’émigration, aujourd’hui ? Pièce pour quatorze danseurs, Odisseia prend les traits d’un fleuve de mouvements ; un voyage où se croisent départs et espoirs de vies meilleures. Sur une musique du compositeur brésilen Heitor Villa-Lobos — à la demande d’Inês Bogéa —, Odisseia conjugue les influences chorégraphiques et musicales. Pièce composée de mélanges cosmopolites, comme la musique d’Heitor Villa-Lobos, Odisseia entrelace fragments des Bachianas Brasileiras (1930-1945) et extraits de La Passion selon Saint-Mathieu (1727) de Johann Sebastian Bach. Avec un final dévolu à la voix de la chanteuse brésilienne Maria Bethânia, chantant Melodia Sentimental – Patria Minha (2003). Une chanson incorporant un poème de Vinicius de Moraes. Pour un triple programme aussi dense que cosmopolite, embrassant le temps et l’espace en un gracieux tourbillon de danse.