Les peintures de Max Rohr nous entraînent dans un rêve éveillé, où les êtres et les choses se bousculent et s’interpénètrent, brouillant nos repères gravitationnels et de perspective. Comme pris dans un processus de mémorisation, le réel est modélisé et s’organise selon un principe d’associations.
Le tableau est pensé dans ses moindres détails, chaque élément étant minutieusement délimité par un trait noir. La découverte des dessins préparatoires exposés au sous-sol de la galerie, permettra de comprendre comment Rohr travaille ses compositions avant de les transposer en peinture.
Chaque tableau met en scène un ou plusieurs protagonistes, avec la figure du peintre comme personnage central. Leurs visages sont fermés et ils paraissent souvent évoluer dans des univers parallèles. Les éléments du paysage et les objets, peints de manière simplifiée et cernés par un trait noir, fonctionnent comme des symboles qui forment le langage de l’artiste : bouteilles, pinceaux, maisons, arbres, chiens, chats, hameçons, vers de terre, fers à cheval, seaux, cœurs, … Avec des vêtements qui laissent affleurer la trace d’objets ou d’animaux, comme s’ils faisaient partie de l’histoire de celui qui les porte.
Ces associations multiples suscitent une grande richesse d’interprétation. Toutefois l’on saisit rapidement que ces compositions sont des histoires de vie ou plutôt l’évocation d’un passé qui remonte aux souvenirs d’enfance du peintre. Les enfants apparaissent d’ailleurs souvent comme des spectateurs de la scène, donnant l’impression d’assister à des événements familiaux qu’ils n’ont pas connus ou qu’on leur aurait caché.
Les sujets sont partagés entre l’évocation d’un monde ouvrier et des scènes bucoliques appartenant à une époque révolue et désuète. Nous sommes revenus cinquante ans en arrière, avec des thèmes à caractère familial et un traitement synthétisé des figures qui réactivent des images d’un autre temps.
La nostalgie nous poigne dès le premier regard, renforcée par une impression de silence et d’immobilité. Les couleurs éteintes dépeignent un monde vidé de son énergie, flottant comme un souvenir. Les visages des personnages ne laissent transparaître aucune émotion, sinon une vague tristesse. Si Rohr évoque des jours anciens, ce n’étaient pas des années de bonheur. Il cache une blessure, un non-dit qui semble sourdre de ces figures répétées au fil de ses peintures.
Max Rohr
— Nowhere Town, 2006. Huile sur toile, 190 x 170 cm.
— Lost Days, 2007. Huile sur toile, 160 x 140 cm.
— My Last Time out, 2007. Huile sur toile, 50 x 60 cm.
— Good time ain’t gone nowhere, 2007. Huile sur toile, 180 x 220 cm.
— Empty Kitchen Blues, 2007. Huile sur toile, 2007, 180 x 210 cm.
— There is something within me, 2008. Huile sur toile, 180 x 210 cm.
— Dessins préparatoires.