ART | EXPO

Impossible

30 Jan - 20 Mar 2003

Quand Philippe Cazal dit «impossible», on peut s’attendre à tout et surtout à ce que s’ouvre tout un panel de «possibles». À l’agence de communication DDB, lieu significatif pour un artiste qui a appliqué à son travail les rouages de la publicité, il joue sur les mots et les images et poursuit sa réflexion sur le langage et le sens.

Communiqué de Presse
Philippe Cazal
Impossible

«Être artiste, pourquoi et pourquoi faire ?»
Texte d’Élisabeth Couturier

«En 1986 dans une interview accordée à la revue canadienne Parachute, Philippe Cazal déclare: «j’étais peintre et sculpteur lorsque j’ai pris la décision d’être artiste». Cette formule radicale fait écho à la question majeure à laquelle sont confrontés les artistes au début des années 70: Être artiste, pourquoi et pourquoi faire?

De fait depuis cette époque, la représentation esthétique traverse une crise. Les genres traditionnels comme la peinture et la sculpture n’ont pas disparu. Ils sont désormais supplantés par d’autres pratiques prenant en compte des champs jusqu’alors étrangers aux beaux-arts. La mode et la publicité par exemple ont largement inspiré l’avant-garde. Et Philippe Cazal est un des tout premier à avoir utilisé dès le début des années 70, les codes visuels de la communication et du marketing. Son œuvre présente toutes les caractéristiques conceptuelles et esthétiques de cette mouvance qui revendique indifférenciation catégorielle et liberté formelle. 
Par ailleurs force est de constater que la performance, le body art, l’art conceptuel, le land art ou les installations ont sérieusement changé la donne des registres du beau et du vrai. Désormais on le sait les attitudes deviennent formes. Et la posture de l’artiste constitue l’axe majeur de l’œuvre. Dans cette perspective Philippe Cazal est un modèle du genre. On peut dire aussi, tant ses procédures sont variées et pour paraphraser Francis Picabia, qu’il est «un artiste en tous genres»…

Trois pôles récurrents traversent de part en part son travail:
— La ville constitue ainsi l’élément référentiel de premier et d’arrière-plan. Elle représente le lieu commun par excellence: lieu économique, politique, commercial, administratif, esthétique. C’est aussi un lieu de mémoire : révolution, lutte, combat de rue, etc. Quoi encore? «La ville, dit-il, m’est apparue comme un grand livre ouvert: affiches, publicités, enseignes, logos sont accessibles à tous.» Espace d’intervention idéal pour un travail in situ, la ville, ses rues, ses publicités, ses enseignes et néons vont lui servir de références esthétiques. Depuis trente ans, il y puise ses sujets, ses propositions plastiques, son sens de la spatialité. Ce lien vital avec l’espace collectif nourrit une œuvre marquée par le refus de couper les ponts avec le public.
— Les mots, autre point de repère, jouent un rôle majeur dans l’œuvre. Logo, slogans et mots d’ordre se déclinent partout, sur toutes sortes de supports: affiches, vêtements, étiquettes, plaquettes, devantures, etc. Utilisés au second degré, ils surprennent. Décalés ou détournés, ils avancent des propositions inattendues. Entre esthétique et éthique, logo, slogans et mots en désordre révèlent constamment les interférences de l’art et de la réalité. Ils ouvrent l’espace imaginaire des possibles infinis.
— Enfin, à travers la diversité des propositions avancées, Philippe Cazal ne cesse d’interroger la place de l’artiste contemporain. Dans et hors du milieu de l’art. Pour ce faire il met en scène et applique sur son propre travail les lois de la production, de la circulation et de la diffusion des marchandises. Ses outils empruntent à l’univers de la mise en image industrielle, à sa typographie et à ses modes de représentations.

Mais au-delà des intentions avouées et inavouées, des prises de positions critiques, être artiste, c’est avant tout pour lui prendre un ticket sans retour pour un itinéraire non balisé. Développée à partir de la rupture opérée dans les années 60-70, cette œuvre emblématique et contemporaine, constamment réactivée, se singularise à travers une énergie subversive permanente. Elle cultive l’ambiguïté entre le déjà vu et le déjà lu. Entre deux cultures, la savante et la vulgaire. Accessible au premier coup d’œil, elle cache sous un humour grinçant plusieurs niveaux de lecture. L’ironie et la dérision la traversent comme vecteurs de déstabilisation et indicateurs de contre tendance. Mais surtout, c’est une œuvre qui interroge le langage et le sens, reconsidère le pouvoir évocateur des mots, privilégie leur puissance poétique et leur part de mystère.»

Commissaire
Élisabeth Couturier

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